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Les Pratiques

Des patrons chinois guidés vers la légalité

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 01.02.2005 | Marie-Noëlle Terrisse, à Milan

Dans la région de Carpi, en Italie, de nombreuses entreprises chinoises de sous-traitance textile prospèrent en partie au noir. Un programme de médiation, financé par des fonds européens, tente un accompagnement en douceur vers la légalité.

Mieux connaître les entreprises textiles créées par des Chinois et les accompagner en douceur vers la légalité et la sortie du travail au noir : c'est l'objectif d'une mission de médiation originale lancée par le consortium Spinner Point en Emilie-Romagne, prospère région d'Italie. « Nous étions partis sur une mission générale pour faire «émerger» le travail au noir. Mais nous avons ciblé les entreprises chinoises parce qu'elles engendraient une inquiétude sociale : phénomène nouveau, en forte croissance, pouvant créer une concurrence déloyale pour les artisans locaux », explique Rossella Cecchini, sociologue et coordinatrice des activités de médiation de Spinner Point.

Implantations massives

Carpi, près de Modène, est l'un des grands districts italiens du textile-habillement. Les entreprises chinoises, qui se sont implantées massivement à la fin des années 1990, ont importé sur place les avantages... d'une délocalisation : flexibilité, délais serrés et prix compétitifs... Les entreprises locales sont donc partagées : les commanditaires tirent profit de la présence des Chinois, mais les fournisseurs italiens ont subi la concurrence de plein fouet. Fin 2003, selon Spinner Point, la région comptait 1 000 entreprises de textile-habillement appartenant à des Chinois, contre 579 en 2000. « En général, leur activité n'est pas totalement illégale : elles sont inscrites à la chambre de commerce puisqu'elles travaillent avec des entreprises locales ! Ce qui n'empêche pas les infractions : aux normes sur la sécurité et sur l'environnement, au régime fiscal et aux lois sur le travail », commente Rossella Cecchini. Ces ateliers pouvaient employer, fin 2003, 9 000 personnes, dont 2 000 privées de contrat de travail et 1 millier de clandestins.

Manuel bilingue

Confronté à une communauté fermée, Spinner Point - auquel participent sociologues, économistes et trois médiateurs culturels chinois - a choisi une politique active, sans équivalent en Italie. Les médiateurs ont tenté d'entamer le dialogue dans les ateliers, avec les patrons. « Aujourd'hui, c'est plus facile, mais lorsque nous avons commencé, on nous fermait souvent la porte au nez ! » raconte Xu Hao, l'un des médiateurs ; 80 entreprises ont finalement joué le jeu et pu, ainsi, accéder à une somme d'informations recueillies dans un manuel bilingue.

Deux rencontres ont accueilli jusqu'à 30 patrons chinois. Six entrepreneurs ont même décidé de recevoir des experts italiens pour faire un check-up de leur société. Les résultats sont certes modestes. Mais, à long terme, selon Rossella Cecchini, même la communauté chinoise de Carpi finira par parier sur la hausse de la qualité plutôt que sur la baisse des coûts.

Auteur

  • Marie-Noëlle Terrisse, à Milan