« Un contrôle renforcé de la maison mère sur de nombreux dispositifs d'avantages sociaux, retraites, prévoyance notamment » : Philippe Burger, actuaire et responsable du département avantages sociaux de Towers Perrin, pronostique la reprise en main et l'harmonisation des politiques de rémunération par les maisons mères, notamment à l'occasion du passage aux IAS-IFRS. « Un possible changement de culture pour bon nombre de groupes français, qui avaient favorisé une approche bien plus décentralisée que les anglo-saxons ». Et de remarquer combien, en deux ou trois ans, les sièges ont déjà donné un tour de vis, en publiant des «benefits guidelines» ou en créant des comités retraites - en plus des comités rémunérations - pour mieux encadrer les pratiques.

Les DRH ne devraient pas pour autant être écartés du chantier. Déjà, dans la plupart des entreprises, ils ont travaillé de longs mois en tandem avec la direction financière pour préparer ce passage aux nouvelles normes.

« Le basculement vers les normes IAS est piloté par des équipes projets sous l'égide de la direction générale, précise Nicole Rueff, spécialiste du passage aux normes IAS-IFRS*. Dans un premier temps, ce sont essentiellement les directeurs financiers qui mènent ces projets. Ils y associent ensuite les opérationnels, dont les DRH. Leur premier travail est de faire l'état des lieux des avantages aux salariés. Il s'avère compliqué, car ces avantages sont plus importants que les entreprises l'imaginaient généralement. »

Chez PPR, la responsable rémunérations et avantages sociaux a ainsi commencé à travailler sur le sujet fin 2001, avec le spécialiste recruté par le groupe pour le passage aux IFRS. « Nous avons réalisé des présentations à l'ensemble des fonctions RH et, en particulier, aux compensation & benefits managers de chaque filiale, explique-t-elle. Nous leur avons indiqué l'ensemble des informations à recueillir et fourni un tableau de marche. En 2002, le périmètre français a fait l'objet de ce recensement ; en 2003, c'était le tour des principaux pays d'implantation du groupe ; et, en 2004, la consolidation des informations RH au niveau mondial. »

Le travail sur les normes comptables a souvent accéléré le rapprochement entre DRH et directions financières, les premières tenues de mesurer précisément le coût des politiques sociales, les secondes sensibilisées au fait que la paix sociale et l'attractivité ont aussi un prix. Le reporting RH sera déterminant sur ces sujets. Un seul exemple, avec les stock-options : le suivi des effectifs de bénéficiaires, et notamment des départs de l'entreprise de cadres ou de dirigeants, qui perdront leur droit d'exercer leurs options, permettra de réévaluer en continu la charge à comptabiliser pour l'entreprise.

Sur une vingtaine de clients qu'elle a accompagnés sur le volet RH du passage aux nouvelles normes depuis quelques années, Catherine Plessis, de Deloitte, a constaté que pour quatre d'entre eux, la DRH avait pris les choses en charge. « Ni les directions financières ni les DRH ne disposaient, au départ, des compétences nécessaires, en particulier en actuariat, explique-t-elle. Dans certains cas, c'est la DRH qui a recruté un actuaire, a identifié tous les avantages et conduit le reporting. Elle a aujourd'hui la main sur le pilotage des dispositifs. » Sans compter les avantages d'un recensement complet : l'une des ces DRH a ainsi mis au jour des problèmes de mobilité entre certaines filiales et pays, dus à des différences importantes d'avantages et de rémunérations globales. Cette DRH est désormais consciente de l'importance de ne plus laisser les RH filiales négocier seules les packages de rémunérations.

* Nicole Rueff a coordonné la rédaction de l'ouvrage Normes IAS/IFRS. Que faut-il faire ? Comment s'y prendre ?, éditions d'Organisation, réédition fév. 2005.