Le constat de départ est simple : dans un grand groupe, un nombre plus ou moins important de cadres performants traversent des «périodes creuses» en attendant une nouvelle affectation. Dans le même temps, les entreprises font de plus en plus appel à des cabinets de conseil extérieurs, pour des missions qui, parfois, exigeraient une meilleure connaissance du groupe.

Conclusion ? Il y a matière à «innover» pour utiliser ces compétences sous-employées. C'est l'intuition de la direction du groupe, en 1999, lorsqu'elle crée Thales Missions et Conseil (TM & C). L'idée s'appuie sur l'expérience du groupe Schneider Electric, qui avait créé une structure similaire en y intégrant les victimes d'un plan de restructuration. Avec quelques différences notables : TM & C devra être autonome financièrement, et recruter ses consultants sur la base du volontariat. Ceux-ci seront temporairement détachés de leur entreprise pour une période de dix-huit mois, pendant laquelle ils conjugueront expérience du conseil et réflexion sur leur projet professionnel.

Cinq ans plus tard, l'expérience semble concluante : en 2004, plus de 300 missions de conseil ont été effectuées, pour un chiffre d'affaires de 7,9 millions d'euros, qui apporte à la structure son équilibre financier. Depuis 1999, plus de 100 personnes sont passées par Thales Missions et Conseil, avant de s'envoler vers un nouveau parcours professionnel.

Vincent Hauseux est de ceux-là. Directeur adjoint de la branche transport de Thales e-transaction jusqu'en 2001, il avait envie de changer de secteur. « La structure TM & C m'intéressait à plusieurs titres : elle m'offrait la possibilité de mieux connaître le groupe, de réfléchir à mon projet, tout en touchant du doigt l'activité de conseil, qui m'attirait. Cela a été un outil extraordinaire pour structurer ma réflexion, en m'appuyant sur des méthodes, en bénéficiant d'un accompagnement et de la confrontation avec mes pairs. Tout cela sans quitter le terrain. Finalement, j'ai compris que j'avais encore envie de travailler dans une filière opérationnelle - le conseil, ce sera pour plus tard -, et j'ai découvert l'univers des affaires militaires. Lorsqu'un poste de directeur a été créé dans la structure pour laquelle j'avais travaillé en tant que consultant, on me l'a proposé », explique-t-il.

Un modèle de réussite pour TM & C, et qui ne semble pas isolé, comme en témoigne Jacques Happel, cadre membre de la CFE-CGC et consultant chez TM & C depuis neuf mois : « Presque chacune de mes missions se termine par une proposition d'embauche ! Pour l'instant, je ne suis pas décidé, mais c'est agréable de voir son travail ainsi valorisé. Je ne connais personne qui regrette son passage chez TM & C. »

« Les consultants ont trois vies à TM & C, complète Bernard Letourneux, directeur du développement professionnel. Les missions, qui occupent 70 % de leur temps ; la vie interne, marquée par différents ateliers et séminaires ; et, enfin, le temps consacré à leur projet professionnel. L'objectif étant d'aider chacun à dessiner des cibles attractives et réalistes. Autre idée-force de notre système : le maintien en bonne forme professionnelle tout au long de sa carrière. Comment ? En cultivant son «savoir-devenir», sa capacité à s'adapter au changement. Les cadres ont conscience, aujourd'hui, de l'importance de cette dimension, et beaucoup décident de rejoindre TM & C hors de toute situation contraignante, simplement dans une volonté de se confronter à d'autres problématiques, de lever le nez du guidon. »

Pour Michel Délon, directeur de TM & C, si la structure peine encore parfois à se débarrasser d'une image de «cimetière des éléphants», elle bénéficie néanmoins d'une très bonne notoriété au sein du groupe. « Nous avons montré que notre concept tenait la route sur la durée. Les premiers résultats d'une enquête d'image, que nous avons menée tout récemment, sont très satisfaisants », assure-t-il.

Et pourtant, point de perspectives de développement important : « En termes de volume, il y a du travail. Nous pourrions donc adopter une démarche plus volontariste, poursuit Michel Délon. Mais, lorsque nous avons envisagé de doubler le nombre de nos consultants, nous nous sommes rendu compte que ce serait très lourd à gérer. Car notre spécificité - un turn-over très important - demande beaucoup d'énergie, en termes de formation notamment. Nous préférons donc la prudence, et une hypothèse de croissance beaucoup plus raisonnable. »

> Activité : plus de 300 missions menées en 2004, essentiellement dans Thales.

> Effectifs : 50 consultants, dont 17 permanents et 33 «détachés».

> Chiffre d'affaires 2004 : 7,9 millions d'euros, dont 50% en partenariat avec des cabinets de conseil externes et 10 % à l'international.