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Halte au clonage de la pensée

Demain | Chronique | publié le : 08.11.2005 | De meryem Le Saget

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Halte au clonage de la pensée

Crédit photo De meryem Le Saget

Comment des personnes éduquées et intelligentes peuvent-elles devenir des clones et entretenir le modèle qui les enchaîne ? Tout simplement en ne se rendant pas compte des effets secondaires de la façon actuelle de travailler.

Culture de la rapidité. Aujourd'hui, tout doit se faire vite. Plus personne n'a le temps de prendre du recul, de réfléchir, de laisser mûrir une décision. Ce sont donc nos réflexes et nos habitudes qui prennent le leadership dans nos vies, car ce sont les réponses les plus rapides. Mais que perd-on ? Le discernement, les solutions innovantes, la capacité de capter les signaux faibles et d'anticiper. Car, en faisant appel à ses automatismes, le cerveau utilise naturellement les sillons déjà tout tracés de sa pensée.

Culte de l'action. La traditionnelle séquence des tireurs d'élite « Armer-en joue-feu ! » devient « Armez-feu !... », et on regarde ensuite ce qui s'est passé. Pas le temps de viser la cible, ni de penser aux conséquences de ce que l'on engage, il faut agir. En entreprise, décaler une réponse pour prendre le temps de réfléchir à d'autres scénarios possibles ou aux conséquences de ses actes, c'est se faire critiquer. Pas le temps non plus d'organiser le changement ni de l'accompagner pour faciliter l'adaptation des personnes. Pas le temps d'inclure dans un projet les services concernés ou de communiquer sur ce que l'on veut faire : l'action prime et emporte avec elle l'intelligence collective. C'est oublier qu'entre la précipitation et l'inertie, se trouvent les chemins de l'excellence.

Omniprésence du stress. Lorsqu'elle est constante et empreinte d'anxiété, la pression crée un horizon de pensée court (la journée tout au plus !). Une multitude de comportements négatifs se développent alors comme des champignons : les jugements catégoriques, le ton impatient qui exige au lieu de demander ; la tendance à être touché, vexé ou mis en cause par les remarques d'autrui ; la justification ou la contre-attaque dès que l'on se sent visé ; bref, un climat d'échauffement où tout le monde a le verbe acerbe et les griffes sorties. Où sont passées l'écoute, la compréhension mutuelle, l'intelligence collective ?

Manie du stop and go. La vie normale de toute entreprise est faite de changements de priorités et d'adaptation à son environnement. Mais il y a quelques variantes plus insidieuses : lancer sans cesse des nouveautés avant même que les initiatives précédentes aient porté leurs fruits ; oublier de suivre les projets en cours, de telle sorte qu'ils tombent naturellement à la trappe ; laisser l'opportunisme ou la réactivité mener le jeu par manque d'anticipation. Ajoutez à cela quelques stratégies purement financières et un ou deux changements de dirigeants, et vous avez le cocktail gagnant de la culture du stop and go. « Faire et défaire, c'est toujours travailler », disent les équipes en soupirant. Mais devant cette montée de l'incohérence, il est clair que le désir d'engagement s'estompe. Il y a tant de possibilités que cela change encore que les personnes ne veulent plus s'investir pour rien.

Et c'est ainsi que des organisations intelligentes, bourrées de compétences et de talents, n'arrivent pas à produire de meilleures performances. Ce sont les automatismes de chacun et le «prêt-à-penser» collectif qui pilotent.

Meryem Le Saget est conseil en entreprise à Paris <lesagetconseil@wanadoo.fr>

Auteur

  • De meryem Le Saget