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Les services se mettent à l'innovation participative

Les Pratiques | Point fort | publié le : 13.12.2005 | Emmanuel Franck

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Les services se mettent à l'innovation participative

Crédit photo Emmanuel Franck

L'innovation participative a longtemps été l'apanage de l'industrie qui y voit un moyen de faire des gains de productivité et d'améliorer la sécurité des salariés. Les entreprises de service commencent à s'emparer de la démarche afin de mieux satisfaire les attentes de leurs clients.

Un module de formation à la sécurité pour des entreprises sous-traitantes ; une nouvelle trousse de secours à l'usage des contrôleurs de la SNCF ; une formation des cadres aux techniques du langage des malentendants... Voilà quelques-unes des milliers d'idées qu'ont eues des salariés pour améliorer l'organisation de leur entreprise. L'innovation participative se porte bien, comme l'atteste la création de «carrefours» dédiés à cette pratique managériale, dont la deuxième édition s'est déroulée les 7 et 8 décembre derniers (lire encadré p. 30). D'abord développée dans l'industrie, au titre du management de la qualité, l'innovation participative commence à intéresser les services. Accor a, ainsi, adopté cette démarche depuis plusieurs années, tandis que la Société générale s'y met. Plus uniquement dédiée à la recherche de gains de productivité, ou à l'amélioration de la sécurité, l'innovation participative sert aussi, désormais, à améliorer le service aux clients.

Alors que La Poste vient d'obtenir l'autorisation de créer sa Banque postale, son Centre régional des services financiers (CRSF) de Nancy a mis au point un module de formation à l'ouverture de comptes bancaires. Le même centre a également eu l'idée d'éditer un guide sur la succession à destination du réseau de vente. L'amélioration de la qualité des lettres envoyées aux clients fait aussi partie de la démarche. Tout autant qu'un processus d'amélioration continue, l'innovation participative est un outil de management.

Une hiérarchie fortement impliquée

Pour motiver les salariés à proposer des idées, le CRSF de Nancy implique fortement sa hiérarchie. Celle-ci participe à la sélection des idées, et celles retenues sont présentées au cours d'une réunion présidée par le directeur du centre. Leurs auteurs sont récompensés par des bons cadeaux de 20 ou 30 euros. Cette année, 60 % des salariés du centre ont déposé une idée sur la base de données Eureka ; 90 % des idées ont été réalisées, car « nous privilégions les idées applicables », explique Hervé Gascard, directeur du contrôle interne et de la qualité du CRSF.

De leur côté, les laboratoires monégasques Théramex (450 salariés, filiale de Merck) recourent à l'innovation participative dans une démarche combinée de recherche de productivité et d'amélioration de l'offre à leurs clientes finales. Spécialisé dans la santé de la femme, Théramex sollicite les idées de ses salariés pour faire des économies (gestion de l'eau, optimisation de la climatisation, regroupement des achats) qu'il investit dans le développement de nouveaux produits. Ceux-ci sont, eux-mêmes, élaborés en sollicitant les salariés au contact avec les clients (gynécologues et patientes). Depuis que la démarche a été mise en place, en 2003, Théramex a développé huit produits, quand il n'en commercialisait, au mieux, qu'un par an auparavant. Si la direction communique beaucoup sur la démarche et organise des événements, la principale motivation des salariés est « de voir les économies réalisées investies dans l'innovation, plutôt que reversées aux actionnaires », explique Pierre-Henry Longeray, président de Théramex.

Amélioration de la productivité

L'innovation participative reste, cependant, principalement utilisée dans l'industrie, pour améliorer la productivité. Le site Motorola d'Angers (370 salariés), spécialisé dans la fabrication d'électronique pour l'automobile, a mis en place, en 2003, des tableaux d'affichage sur lesquels les opérateurs déposent des cartons où ils inscrivent leurs idées. Divisés en zones : «idée émise», «en analyse», «en cours de réalisation», «réalisée» ou «refusée», ils permettent de suivre la progression des idées. Pour améliorer l'appropriation du dispositif par des opérateurs parfois réticents à se mettre en avant, la direction a, ensuite, procédé à deux innovations. Les tableaux ont été thématisés et, surtout, elle a créé deux postes de «facilitateurs», issus des lignes de production, pour aider les opérateurs à formaliser leur idée et vaincre d'éventuelles réticences à s'exprimer. Ils y consacrent une journée par semaine. Résultat, entre janvier et novembre 2005, 500 idées ont été émises, et 350 réalisées. Christophe Defoix, responsable de l'amélioration continue, estime que le processus d'amélioration continue permet au site d'économiser 300 000 à 500 000 euros par an. La Franco-Belge de fabrication de combustible (FBFC), utilise, également, des tableaux pour recueillir les idées de ses salariés. Depuis que cette filiale d'Areva spécialisée dans la fabrication de combustible nucléaire a mis en place la démarche, en 1996, elle a recueilli 13 000 idées, dont 70% ont été réalisées. Six salariés sur dix ont participé.

Une implication des salariés indispensable

L'implication du plus grand nombre de salariés possible est la condition sine qua non au développement de l'innovation participative. En 1999, année de la mise en place de la démarche, le site de Dombasle-sur-Meurthe de Solvay (450 salariés), spécialisé dans la chimie minérale (carbonate et bicarbonate de soude), n'a recueilli «que» 400 idées. Cinq ans plus tard, en 2004, 811 idées ont été émises. Pour doubler ce chiffre, la direction a dû rendre son processus de recueil plus réactif. Depuis 2001, le site est doté d'un portail intranet, «Innoplace», sur lequel les salariés peuvent déposer leurs idées. Elle a, également, remplacé la commission chargée de statuer sur le devenir d'une idée par un réseau, plus souple, de «facilitateurs». Enfin, elle a réévalué les critères de sélection des idées. « L'important n'est pas tant d'avoir une idée innovante que d'avoir une idée », explique Sébastien Duval, chef du service énergie et utilités.

Le «rendez-vous» de la SNCF

Afin d'impliquer ses salariés, la SNCF a fait les choses en grand. Le 5 avril dernier, elle a convié, au siège, 600 salariés à un «Rendez-vous de l'innovation participative», en présence, notamment, de son président et de son DRH. Au cours de cette journée, les auteurs de 229 idées, accompagnés de leurs responsables hiérarchiques, sont venus présenter leurs projets à 80 «spécialistes». « Selon le principe du speed dating, chacun disposait d'un quart d'heure maximum », explique Béatrice Verger, responsable de l'innovation participative. Cent vingt idées ont été retenues. Dans leur majorité, elles visaient à augmenter la sécurité et l'efficacité du travail : alarme anti-agression, formation à la fermeture des portes des trains Corail... Parfois à améliorer le service au client : affichage d'un plan de métro dans les trains à destination de Paris.

Trophées de l'innovation participative pour FBFC et Solvay

Remis le 7 décembre, au cours des Carrefours de l'innovation participative, organisés par l'association Innov'Acteurs, les Trophées de l'innovation participative sont allés à la Franco-Belge de fabrication de combustible (FBFC), filiale d'Areva, spécialisée dans la fabrication de combustible nucléaire, pour la catégorie des entreprises de plus de 500 salariés ; et à l'usine Solvay, de Dombasle-sur-Meurthe, dans celle des moins de 500 salariés.

Le prix spécial du jury à été remis au Centre régional des services financiers (CRSF) de La Poste de Nancy.

L'essentiel

1 A la fois processus d'amélioration continue et outil de management, l'innovation participative permet d'impliquer la hiérarchie de l'entreprise dans la motivation des salariés à proposer des idées.

2 C'est le choix qu'ont notamment fait la FBFC et l'usine Solvay de Dombasle-sur-Meurthe, ainsi que le Centre régional des services financiers de La Poste de Nancy, récompensés lors de la remise des Trophées de l'innovation participative, le 7 décembre dernier.

Auteur

  • Emmanuel Franck