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Pour certains, la réforme est déjà «digérée»

Enquête | publié le : 28.02.2006 | L. G.

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Pour certains, la réforme est déjà «digérée»

Crédit photo L. G.

La réforme est déjà une réalité... pour certaines entreprises ! Lesquelles ? Pourquoi ? Plongée au coeur de 200 sociétés qui ont réussi l'application de la réforme, au travers d'une étude du cabinet- conseil en formation lillois Caraxo.

«La réforme n'en est plus une. Elle laisse la place à un nouveau rapport à la formation professionnelle. Une grande partie des entreprises sondées affichent une position assez positive sur la réforme. Les modifications sont aujourd'hui bien présentes et il n'est plus tant question de vérifier la connaissance des dispositifs que de s'attacher au constat de leurs applications. Le sujet a dépassé les portes de la simple réforme pour devenir une réelle composante d'une approche plus structurée encore du rapport à la formation professionnelle continue », s'enthousiasme Philippe Bernier, directeur de Caraxo Conseils, qui vient de produire une étude (1).

L'intérêt de cette étude est, de fait, son panel : une série d'entreprises ayant déjà digéré et, pourrait-on dire, réussi la réforme. S'y trouvent, évidemment, de grosses entreprises, qui étaient déjà actives en matière de formation avant la réforme, mais pas uniquement, car certaines PME sont également très avancées. « Il n'y a pas de réelles différences entre les deux, même si, bien entendu, les résultats sont plus prononcés pour les entreprises de plus grande taille, car ces dernières ont certainement, pour la plupart, abordé le sujet plus tôt. » Quelles sont leurs recettes ? Réponses en neuf points.

1 Le niveau de connaissance des arcanes de la réforme est élevé

82,90 % des entreprises soulignent maîtriser totalement ou à peu près la réforme de la formation. Pour celles de 500 salariés et plus, ce taux monte à plus de 93 %, dont 36,26 % qui déclarent maîtriser complètement le sujet.

70,98 % des entreprises interrogées estiment que la catégorisation du plan de formation participe à améliorer l'analyse des besoins en formation. La période de professionnalisation fait l'objet d'une utilisation pour 64,25 % d'entre elles ; 95,34 % annoncent avoir informé les salariés sur le DIF ; et 59,07 % estiment que le DIF constitue l'occasion de mettre en oeuvre un projet professionnel.

2 La «branchification» du droit de la formation n'a pas empêché la mise en place de ces nouveaux rapports à la formation

La complexification du droit de la formation provient des différentes positions prises par les branches sur l'opérationnalisation de thèmes ou de dispositifs tels que le contrat de professionnalisation, la période de professionnalisation, le rapport à la certification ou la qualification, ou encore le rapport au temps de travail.

Toutefois, la complexité de la «branchification» du droit concerne, avant tout, les acteurs externes à l'entreprise et, plus particulièrement, les organismes de formation qui sont amenés à proposer leurs services et leurs produits formation aux entreprises appartenant à des branches d'activité différentes.

Car, seules 23,32 % des entreprises prévoient de se positionner sur les priorités de branches pour accepter du DIF. Seules 5,70 % des sondées déclarent n'avoir pas conclu de contrat de professionnalisation du fait de la restriction de la branche professionnelle ; 64,25 % des entreprises annoncent déjà bénéficier de la période de professionnalisation. Or, la professionnalisation et le droit individuel à la formation sont les nouveautés du droit de la formation professionnelle, qui ont fait l'objet du plus grand nombre de négociations dans les branches professionnelles.

« L'entreprise n'est pas réellement confrontée à cette fameuse «branchification» quand elle n'a à répondre qu'à une seule branche professionnelle, analyse Philippe Bernier. C'est plus compliqué pour les groupes intervenant dans des activités diverses et multiples et appartenant à différentes branches professionnelles, mais le problème n'en est pas, pour autant, insurmontable, surtout si les Opca assurent une information technique suivie. »

3 Les entreprises ont l'intention de signer des accords en matière de formation

58,55 % des entreprises ont signé un accord (21,76 %) ou ont l'intention de le faire (36,79 %). Une infime partie des entreprises (2,59 %) ne perçoivent aucun intérêt dans la mise en place d'un accord d'entreprise ; 38,86 % n'envisagent pas d'en signer un, sans pour autant estimer que c'est inutile.

« Cela nous amène à penser qu'elles y seraient favorables, mais que d'autres raisons les en empêchent et, parmi celles citées, on trouve : l'absence de délégués du personnel ; ce n'est pas le moment ; pas le temps ; la mauvaise conjoncture économique et/ou des relations sociales difficiles... »

Les accords d'entreprise signés ou en préparation (pour la plupart dans les entreprises de 500 salariés et plus, et plus particulièrement dans les entreprises de grande taille - 3 000 et plus) sont construits sur les principaux thèmes de la «réforme» de la formation.

L'ensemble est souvent inscrit dans une politique formation souhaitant, à la fois, mettre en avant le principe de la responsabilité de l'entreprise en matière d'adaptation des salariés au poste de travail, et rappeler d'autres principes forts tels que le co-engagement et le co-investissement du salarié.

4 Le plan de formation est destiné à être construit différemment

Une construction différenciée du plan va se faire progressivement. « Dans un premier temps, il a fallu comprendre la catégorisation et, globalement, l'approche de la construction d'un plan de formation catégorisé s'est effectuée souvent par obligation «juridique». Mais ce cap nous semble dépassé. » 70,98 % des entreprises sondées considèrent la catégorisation comme un outil d'analyse des besoins en formation. Concernant les entreprises de 500 salariés et plus, 91 % d'entre elles estiment que la catégorisation favorise l'analyse des besoins, la politique formation, la GPEC...

5 La quasi-totalité des entreprises annoncent faire ou avoir l'intention de mettre en place des entretiens professionnels

90,77 % des entreprises annoncent faire ou avoir l'intention de mettre en place des entretiens professionnels ! 79,79 % estiment que l'entretien professionnel constitue un outil au service du salarié. Sans que cela soit paradoxal, 63,73 % considèrent que cet entretien est également un outil au service de l'entreprise ; 61,66 % des entreprises le font ou le feront en dehors de tout autre entretien tels que évaluation, objectif, performance...

6 La majorité des entreprises sont favorables à la formation en dehors du temps de travail, mais très peu la pratiquent

62,64 % des entreprises sont favorables à la formation hors temps de travail (HTT). Ce taux monte à 70,33 % pour les entreprises de 500 salariés et plus. Mais très peu prévoient d'y avoir vraiment recours.

« Les entreprises voient dans le rapport formation/HTT davantage un moyen d'estimer la motivation du salarié (76,68 %) qu'une façon de gagner du temps de travail (31,09 % et 27,47 % pour les entreprises de 500 salariés et plus). Cette notion de HTT ne semble donc pas, pour l'instant, être une préoccupation première des entreprises. Il conviendra de suivre cette position lorsque le nombre de départs à la retraite deviendra de plus en plus important », analyse Caraxo Conseils.

« La notion de HTT existait déjà avant la réforme. Elle a cependant été largement simplifiée, notamment avec le fait qu'il n'existe désormais qu'une seule façon de l'organiser. Dans la pratique, on constatait assez régulièrement des formations en HTT ne respectant pas ces règles. On peut se demander si ce nouveau rapport formation/HTT permettra de régulariser certaines situations. »

7 Le Droit individuel à la formation (DIF) a largement été annoncé

95,44 % des entreprises ayant répondu à ce questionnaire annoncent avoir assuré l'information sur le DIF auprès des salariés ; 80,10 % des entreprises ont choisi une communication large, permettant une explication complète du sujet. Courriel, intranet, courrier individualisé, document spécifique... ont été utilisés pour expliquer aux salariés le droit individuel à la formation ; 47,15 % ont utilisé, notamment, le bulletin de paie comme moyen de communication ; 45,03 %, notamment, un courrier individualisé (sans passer par le bulletin de paie) ; 2,09 % des entreprises ont utilisé exclusivement la voie électronique.

Pour autant, 32,12 % des sociétés n'envisagent pas de proposer des actions de formation dans le cadre du DIF. Pour celles qui pensent le faire, 40,93 % passeront par l'entretien professionnel. Les actions de formation relèveront, pour 43,01 %, des priorités d'entreprise et, pour 23,32 %, des priorités de branche. L'idée d'un catalogue DIF entreprise n'emporte que 9,84 % des suffrages.

82,90 % des entreprises estiment que le DIF se doit d'être attaché à un objectif soit professionnel (59,07 %), soit lié au plan de formation (23,83 %). Toutefois, selon les sondées, le DIF ne répond pas à un besoin directement lié au plan.

Le DIF, dans sa relation au HTT, fait état d'un positionnement partagé de la part des entreprises : 43,01 % sont favorables à un DIF HTT alors que 44,04 % restent attachées à un DIF pendant le temps de travail. L'intérêt du HTT s'analyse en fonction des organisations spécifiques à chaque entreprise ou encore au regard des postes occupés par chaque collaborateur.

8 La «branchification» du droit de la formation ne suffit pas à expliquer la désaffection des entreprises pour le contrat de professionnalisation

Parmi les entreprises sondées, 53,88 % déclarent avoir signé un contrat de professionnalisation, ce taux est de 64,84 % pour les entreprises de 500 salariés et plus ; 70,80 % des entreprises qui connaissent le contrat de professionnalisation ne voient pas dans sa mise en place une réelle complexité, et 60,67 % de celles n'en ayant pas signé l'expliquent par le fait que ce n'est tout simplement pas une priorité du moment. Seules 12,36 % de ces entreprises déclarent ne pas avoir conclu de contrat du fait des conditions restrictives d'accès à la professionnalisation de leur branche. « Ce qui casse certaines idées reçues sur l'impact négatif des accords de branche en matière de professionnalisation. En revanche, 74 % des entreprises ayant signé un contrat de professionnalisation déclarent avoir fait l'objet d'une information préalable par leur Opca. Cela laisse présumer que le travail de l'Opca a été assez déterminant dans la décision de mise en place du contrat de professionnalisation. »

9 Une grande majorité des entreprises ont déjà utilisé la période de professionnalisation

64,25 % des entreprises sondées ont bénéficié d'une ou de plusieurs périodes de professionnalisation. Là encore, le rôle de l'Opca a été déterminant : 55,97 % des entreprises qui ont bénéficié d'une période de professionnalisation ont reçu une information préalable de leur Opca.

« Les entretiens complémentaires font apparaître une forte demande des entreprises en matière de périodes de professionnalisation, y compris de la part de celles qui n'en font pas encore. Il est à parier que les demandes devraient croître, notamment en lien avec les plans de formation définis au titre de l'année 2006. Le lien entre DIF et professionnalisation n'est pas encore une réalité. »

(1) Cible de l'enquête : clients, contacts, réseaux d'entreprise du cabinet Caraxo Conseils, sur la base d'un fichier de 1 000 entreprises ; 193 ont répondu au sondage courant décembre 2005, dont 91 entreprises de 500 salariés et plus. Pour un nombre de salariés d'environ 450 000.

Nombre d'Opca impliqués : 44.

Le questionnaire comportait une vingtaine de questions semi-ouvertes et fermées, et a donné lieu à des entretiens complémentaires.

Opca : un rôle de conseil à renforcer

Les entreprises sondées répondent à une forte majorité que les Opca ont, la plupart du temps, été très présents sur le terrain technique. Ce sont plus de 63,21 % (ce taux monte à 76,92 % pour les entreprises de 500 salariés et plus) qui annoncent rencontrer leur Opca régulièrement, voire souvent. Seules 13,58 % soulignent que leur Opca ne leur apporte aucun service. A contrario, la satisfaction des entreprises sur l'apport de leur Opca paraît réelle à 86,42 %.

79,42 % des entreprises rencontrées par un Opca soulignent que le conseil a concerné des questions relatives au financement de la formation ou au droit de la formation. En revanche, les Opca semblent avoir été moins présents sur la phase du conseil dans l'élaboration du plan de formation : seules 3,11 % des entreprises et 1,09 % pour celles de plus de 500 salariés déclarent avoir été accompagnées par leur Opca sur ce sujet.

« On peut imaginer que cette approche pourra faire l'objet d'une réflexion future et qu'à terme, les Opca pourraient progressivement apporter un service de ce type à leurs entreprises adhérentes, commente Philippe Bernier. Il a souvent été question de parler d'externalisation en matière de formation et pas seulement pour la seule gestion administrative de la formation. »

Auteur

  • L. G.