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Les Francais toujours motives

Dossier | publié le : 04.04.2006 | Laurent Gérard

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Les Francais toujours motives

Crédit photo Laurent Gérard

Alors que la réforme de la formation s'installe cahin-caha dans les entreprises, les Français confirment leur intérêt pour l'acte d'apprendre, mais avouent également leur manque d'information.

En 2005, 11 950 droits individuels à la formation (DIF) ont été acceptés et financés par les Opca, selon des chiffres du Fonds unique de péréquation (FUP), arrêtés au 31 décembre 2005, et transmis récemment aux partenaires sociaux membres du Comité paritaire national de la formation professionnelle. On apprend, également, que 114 400 contrats de professionnalisation et 242 000 périodes de professionnalisation ont été pris en charge par ces mêmes Opca en 2005. Les disponibilités financières 2005 se montaient à 2,4 milliards d'euros, seul 1,3 milliard a été engagé. Le solde s'élevait donc, fin décembre, à 1,1 milliard d'euros. Les entreprises et les salariés peuvent tirer une conclusion de cet élément de bilan (très) partiel de l'application de la réforme de la formation en 2005 : il reste de la marge à consommer... vite, avant que Bercy n'y voit une cagnotte à saisir !

Un intérêt confirmé

Ce bilan tombe bien : les Français confirment leur intérêt pour la formation, comme le démontre une toute récente étude Ifop : 63 % des personnes interrogées déclarent avoir déjà goûté à la formation professionnelle continue, et 68 % aimeraient bien continuer à en bénéficier ! La réforme en cours va-t-elle répondre à ce désir ? C'est bien toute la question.

On savait depuis fort longtemps qu'il vaut mieux être cadre, homme, dans une grande entreprise d'Ile-de-France qu'ouvrier, femme, dans une PME de province pour bénéficier à plein de la formation professionnelle. Or, l'application de la réforme aurait, pour l'heure, plutôt tendance à accentuer ce trait. Le Groupement des animateurs et responsables formation en entreprise (Garf) le reconnaît d'ailleurs facilement dans une de ses dernières analyses : la réforme « profite largement aux grandes entreprises », mais « les PME, à de rares exceptions près, en sont encore au stade de l'information ». L'Union professionnelle artisanale (UPA), troisième organisation patronale (avec le Medef et la CGPME) à avoir signé les ANI de 2003 ayant lancé la réforme, l'accorde également : « Dans l'artisanat, le DIF n'est pas encore opérationnel. »

Le DIF n'est pas un réflexe partagé

Et même si, dans le monde de la métallurgie, le DIF semble décoller, puisque 3 000 DIF ont été demandés et accordés depuis le début 2006, constate Dominique de Calan, délégué général adjoint de l'UIMM (ce qui ne manque d'ailleurs pas de l'étonner, lui « qui n'y croyait pas avant deux ou trois ans »), le DIF n'est pas encore un réflexe partagé.

Le cabinet DIF-Expert a tenté de mesurer le coût latent de la non-consommation de DIF. Selon le directeur de ce cabinet, Pascal Chauvin, « 10 milliards d'euros : c'est la résultante de la dette accumulée sur le seul exercice 2005 par les entreprises françaises du secteur privé, par le dédain ou l'attentisme accordé à la réforme et, plus particulièrement, vis-à-vis du DIF ».

Encore trop tôt pour un bilan

Philippe Joffre, consultant en management de la formation, estime, cependant, qu'« il est largement trop tôt pour se prononcer sur le succès ou l'échec de la réforme. Les entreprises sont très souvent rentrées dans la loi de mai 2004 par les aspects techniques et financiers. Cela est assez logique : les entreprises de plus de 2 000 salariés, par exemple, ont, de façon très volontariste, optimisé leur budget de formation avec une baisse du taux de participation de 2 points en dix ans environ. Les prévisions des experts, annonçant que le DIF allait potentiellement leur coûter 2 % de masse salariale par an, ont induit certains comportements et renforcé l'attentisme des acteurs jusqu'à différer de gros projets de formation. Mais, les choses évoluent largement depuis le début de l'année ».

Des inégalités d'accès accentuées

« Cela dit, poursuit Philippe Joffre, la réforme a considérablement augmenté la complexité de l'ingénierie, de la gestion et du financement des dispositifs de formation tout en introduisant un avant - VAE, bilans, entretiens... - et un après-formation - qualification, certification, voire promotion - jusque-là généralement absents. Ainsi, loin de réduire les inégalités d'accès entre petites et grandes entreprises, la loi les renforce. » Les salariés veulent se former, mais la capacité de réponse de leur entreprise reste très variable.

L'essentiel

1 Une étude Ifop confirme l'intérêt des Français pour la formation professionnelle continue.

2 La réforme en cours n'a pas encore fait la preuve qu'elle augmentait le taux d'accès des salariés français à la formation, notamment de ceux qui n'en ont jamais eu.

3 Par mesure de précaution financière, les entreprises ont freiné les dépenses formation en 2005, mais, selon plusieurs sociétés de formation, l'année 2006 affiche un bon carnet de commandes.

Auteur

  • Laurent Gérard