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Les Pratiques

Radio France veut résorber ses contrats précaires

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 04.07.2006 | Patricia Sudolski

La diminution du nombre de précaires était une demande prioritaire du personnel de Radio France. La direction commence ce mois-ci à procéder aux 45 embauches promises parmi les journalistes. Un résultat obtenu sans dépassement budgétaire.

En 2005, quand une intersyndicale des journalistes de Radio France s'est constituée sur le thème de la réduction de la précarité, la direction n'a pas voulu jouer avec le feu. Début 2004, Radio France avait, en effet, dû faire face à dix-huit jours de grève des journalistes pour des revendications salariales. Et Jean-Paul Cluzel, nommé, le 12 mai 2004, Pdg de la maison, n'avait pas envie de prendre ses fonctions sur fond de conflit social. D'autant plus qu'à son arrivée, il annonçait qu'il se fixait pour but la modernisation sociale avec pour volonté de protéger les personnes, de valoriser les potentiels et d'optimiser les structures.

Embauches à budget constant

Un accord de 45 embauches a donc été signé le 3 juin 2005. Or, le recrutement dans le service public est un pari difficile. En effet, l'injonction de l'Etat est de ne pas faire déraper les budgets. En 2005, Radio France a dépensé 313 millions d'euros en charges de personnel, dont 58 millions pour la rémunération des contrats précaires. En 2006, le budget doit rester constant. Pour payer ses nouveaux CDI, la société nationale s'est donc engagée à utiliser des crédits destinés à payer les non-titulaires. L'embauche concerne un quart des précaires journalistes. « Les intentions sont bonnes, c'est vrai, mais c'est venu grâce au rapport de forces, estime Hubert Huertas, élu SNJ (Syndicat national des journalistes) en poste à Marseille. Les chiffres de la précarité étaient trop criants, la direction était obligée d'avancer. » Dans un souci de transparence, la direction livre les chiffres : « En 2005, détaille Dominique Gicquel, directrice déléguée à la gestion des ressources humaines, Radio France comptait 4 179 salariés permanents dont 2 368 techniciens, administratifs et personnels de la logistique, 627 journalistes, 358 musiciens et choristes, 356 employés d'antennes locales. »

Personnels précaires

Le personnel travaillant à l'antenne comprend la plus grosse part des précaires : journalistes, chroniqueurs, producteurs et animateurs de programmes. En renfort des 627 journalistes «en pied», 129 travaillaient en CDD et 129 en équivalent temps plein pigiste (c'est-à-dire payés à la tâche). « En tout, précise Dominique Gicquel, nous étions à 200 équivalents temps plein assurés par des précaires. Nos métiers, justifie-t-elle, qui ont une activité 7 jours sur 7 et, sur certains sites, 24 heures sur 24, génèrent inévitablement de la précarité. Nous avons besoin d'un important volant de remplaçants. »

Les syndicats sont satisfaits de ce discours clair et vont plus loin : « Radio France a réussi à multiplier les antennes depuis vingt ans grâce aux précaires, affirme Hubert Huertas, le minimum est, à un moment, de les remercier. » Mais, la rémunération des précaires doit être encadrée. « Nous faisons du contrôle de gestion pour que nos budgets ne dérapent pas, assure Dominique Gicquel, nous menons une politique de vases communicants. Depuis trois ans, il existe déjà une cellule qui suit l'évolution du nombre de CDD pour en contrôler le flux, et ça marche. Nous prévoyons un budget 2006-2007 maîtrisé. » Les syndicats sont d'accord avec l'objectif mais ont quelques craintes : « On a peur de tomber dans une gestion purement comptable, aveugle des moyens, dit Hubert Huertas. Il est tentant, ainsi, pour la direction, d'imposer des sacrifices aux petites équipes parce que c'est moins visible. Alors, on veille. »

Dialogue social fondé sur la confiance

Contenir la précarité, cela veut aussi dire que le vivier des permanents de Radio France doit être plus rentable. « Tout le monde doit désormais travailler le dimanche et étaler ses vacances, mais ce n'est pas un problème, dit Hubert Huertas. L'écrasante majorité des journalistes se plient déjà à cette règle. »

En revanche, pas question de laisser la direction réviser à la hausse les 35 heures. « Dans ce cas-là, précise l'élu, on bloquera la machine. » La direction, elle, n'est pas vat-en-guerre : « Nous tenons à développer un dialogue social fondé sur la confiance, » promet Patrice Papet, le nouveau directeur général adjoint.

Des créations à succès

Personne ne veut bousculer la maison Radio France, car le produit fonctionne. Dernière-née : France Bleu Ile-de-France. « Toutes les créations sont toujours des succès, explique Hubert Huertas, ainsi, France Bleu, alors qu'elle ne diffuse que sur 50 % du territoire, assure déjà un peu plus de 6 % de l'audience de Radio France. La tutelle pleure, mais les deniers du service public sont bien employés. » Une assurance que la direction ne dément pas et qu'elle saura faire jouer.

Un effort de transparence sur les stages

En 2005, 754 stagiaires englobant les scolaires et les étudiants, dont 376 journalistes, sont passés par Radio France. Montrée du doigt par le collectif Génération précaire, la maison a décidé de clarifier ses rapports avec les stagiaires. Elle a demandé à tous ses administrateurs d'installer un accueil, un suivi, un tutorat, une surveillance de l'emploi des stagiaires. Le stage ne doit pas excéder six mois. Au-delà de trois mois, il sera rémunéré par une indemnité de 30 % du Smic, voire un peu plus.

Auteur

  • Patricia Sudolski