Suite à un stage de peinture suivi à titre personnel chez le peintre Olivier Wahl, Micheline Pujolle-Jacottin, responsable ingénierie de formation au département «matériel roulant bus» (MRB) à la RATP, a décidé de tester la méthode dans son service. Chacun dispose de feuilles et de peinture à volonté pendant deux heures, puis exprime, durant l'heure qui suit, ce qu'il a ressenti, ses doutes, ses peurs, ses joies, la manière dont il a réagi. Le peintre Olivier Wahl aide ensuite le stagiaire à décoder ce qui s'est opéré.

« J'ai immédiatement fait le lien avec ce qui se passe dans l'entreprise. Les comportements dont les stagiaires parlaient correspondaient à leur mode de fonctionnement au travail, face aux changements qui les bousculent », explique Micheline Pujolle-Jacottin, persuadée, après cette séance, de l'intérêt de construire un outil de formation qui aiderait les salariés à comprendre et à mieux vivre les changements en se positionnant différemment face à eux.

Un budget de recherche lui est accordé, lui permettant de programmer, au sein de son département, une dizaine de journées «Peindre et voir». « C'est un espace de maturation du changement. Les stagiaires mûrissent leur situation professionnelle pour qu'elle fonctionne mieux », explique la responsable. Elle donne à ces stages le nom de «formation-développement». « Ce n'est pas du développement personnel, car l'enjeu est collectif. Les stagiaires trouvent, dans cet espace, du recul, du calme, une réponse à leur stress et une possibilité d'analyser leur situation de travail. La démarche peut enlever des peurs qui agissent comme des freins », explique-t-elle.

L'expérimentation, commencée en 2003, a donné lieu, en fin de première année, à des entretiens favorables à la poursuite de l'action. Le budget recherche s'est élevé à 60 000 euros sur trois ans. Aujourd'hui, ce stage est proposé à l'ensemble des salariés. Le coût de 200 euros la journée est financé sur le plan de formation, et le DIF est parfois utilisé.

La démarche a également été proposée suite au stage «Etre manageur en environnement complexe», créé par Micheline Pujolle-Jacottin et le réseau des formateurs internes. Soixante stagiaires l'ont déjà suivi. Quinze sont aujourd'hui demandeurs.

Suite à cette expérimentation, Micheline Pujolle-Jacottin évoque l'intérêt de créer un espace, intégré dans l'entreprise, où tous les salariés pourraient se rendre pour prendre du recul, aidés par des «accompagnateurs de changement». Elle a coécrit, avec le peintre Olivier Wahl, Ni le rêve, ni l'enfer, la peinture comme outil de formation dans l'entreprise (éditions Robert Jauze, 2006).