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«Détayloriser» le travail des seniors

Enquête | publié le : 19.06.2007 | C. L.

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«Détayloriser» le travail des seniors

Crédit photo C. L.

Confronté à un sérieux problème de stress, le laboratoire Ceva Santé animale a réalisé un état des lieux des maux de l'entreprise qui l'a conduit à lancer un chantier de gestion des âges.

Nous sommes en 2001. Emmanuelle Trébot vient d'être nommée au poste de DRH de Ceva Santé animale, un laboratoire pharmaceutique vétérinaire implanté à Libourne. Elle est rapidement sollicitée par les élus du CHSCT et les délégués syndicaux, qui entendent l'alerter sur une sérieuse situation de stress vécue dans l'entreprise. « Je lance alors un diagnostic de la situation », se souvient-elle. L'intérêt de sa démarche : un regard neuf porté sur l'organisation du travail.

Bilan sévère

Durant six mois, elle passe en revue les différents postes de travail, étudie la population de l'entreprise et s'entretient avec les salariés. Le bilan est sévère : pyramide des âges vieillissante, taux d'absentéisme de 25 % avec de fréquentes longues maladies, intérimaires nombreux... Le tout complété par un taux d'inaptitude flirtant avec les 30 %. « De plus, j'avais constaté un très faible taux d'encadrement, de l'ordre de 2 managers pour 50 collaborateurs, sans encadrement intermédiaire. »

Les salariés, à qui on demandait toujours plus de polyvalence, éprouvaient un sentiment de grande insatisfaction au travail. Surtout les plus âgés. Il n'était, ainsi, pas rare que des conflits éclatent dans les équipes. Autre facteur de stress : la coexistence d'intérimaires juniors avec des CDI seniors. « Les titulaires devaient en permanence former ces jeunes recrues. Ils se sentaient isolés et non reconnus dans leur travail. Leur souffrance était d'autant plus ressentie qu'ils devaient s'adapter à l'arrivée de nouveaux produits en fabrication », raconte la DRH. Ils avaient donc l'impression de devoir faire table rase de tout ce qu'ils avaient jusqu'alors réalisé.

Nouvelle organisation

L'organisation tout entière a été revue. « Nous avons mis en place un encadrement intermédiaire pour accompagner les salariés dans leur progression de compétences. Puis, nous avons décidé d'intégrer les intérimaires, de l'ordre d'une trentaine sur trois ans. » Ensuite, la DRH s'est attelée à un chantier concernant la gestion des âges. « Nous avons réfléchi à propos des seniors : comment faire en sorte qu'ils se sentent considérés ? Comment transférer leur savoir-faire ? Comment diminuer la pénibilité de leurs tâches ? », énumère Emmanuelle Trébot.

Option choisie : une «détaylorisation» des emplois. Ainsi, les seniors se sont-ils vu confier des missions transverses touchant à l'administratif, à la qualité et à la sécurité. Certains sont aussi passés de postes industriels à la recherche & développement. En parallèle, et en collaboration avec l'Aract Aquitaine, Ceva Santé animale a travaillé sur la pénibilité, conduisant à une simplification des process et à des améliorations ergonomiques.

Tutorat des jeunes

« On a également demandé aux seniors de tutorer des jeunes en difficulté, dans le cadre de conventions avec les missions locales. Nous accueillons donc des jeunes en «parcours découverte». Nos seniors sont chargés de leur remettre le pied à l'étrier », explique la DRH.

Les premiers résultats sont concluants. Tout d'abord, le stress, figurant dans le document unique d'évaluation des risques, fait l'objet de mesures quantitatives présentées à chaque CHSCT. Par ailleurs, un comité de pilotage, réunissant partenaires sociaux, médecin du travail et représentants des différents métiers, est en place pour observer l'état de stress. Quant au groupe chargé de la gestion des âges, il est toujours en place. L'absentéisme est passé de 22 % à 6 % en deux ans.

ceva santé animale

> Activité : pharmacie vétérinaire.

> Effectifs : 1 800 salariés (monde), 600 salariés (France).

> Chiffre d'affaires 2006 : 300 millions d'euros.

Auteur

  • C. L.