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« Les accords dérogatoires sont une demande idéologique du patronat »

Enquête | publié le : 01.04.2008 |

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« Les accords dérogatoires sont une demande idéologique du patronat »

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E & C : Selon quel critère la représentativité doit-elle être mesurée ?

J.-M. P. : La mesure de l'audience des syndicats est incontournable. Etant donné qu'il y a une corrélation entre le nombre d'adhérents et l'audience d'un syndicat, la mesure de l'audience permet d'éviter la recherche, complexe, du nombre d'adhérents.

E & C : A quel type d'élection êtes-vous favorable ?

J.-M. P. : J'ai une préférence pour le système belge : des élections par branches, le même jour. Ce système a, notamment, l'avantage de réhabiliter la branche et d'éviter que les syndicats ne restent confinés dans l'entreprise.

Une élection au niveau de l'entreprise ne concernerait pas tous les salariés, car beaucoup, notamment dans les PME, n'iraient pas voter afin de ne pas se rendre suspects aux yeux de leur employeur. Quant à l'élection prud'homale, elle fournirait de mauvais indicateurs, car les syndicats ne s'y distinguent pas vraiment les uns des autres.

Par ailleurs, je suis favorable à une élection à deux tours, dont le premier serait ouvert à tous les syndicats légalement constitués et respectant les valeurs républicaines, et le second, ouvert aux non-syndiqués. Il me semble, en effet, risqué de réserver ces élections aux seules listes syndicales.

E & C : A quel niveau le seuil d'audience ouvrant droit à la représentativité devrait-il se situer ?

J.-M. P. : Le seuil pour accéder au droit de négocier devrait se situer à un niveau assez élevé - 10 % - pour inciter à des alliances et à des rassemblements entre syndicats, gages d'efficacité face à l'employeur. Il s'agit de maintenir un pluralisme syndical, sans créer de la dispersion.

E & C : Etes-vous favorable aux accords majoritaires ?

J.-M. P. : Oui. Les risques de blocage, invoqués par les employeurs, n'existent plus. Ainsi, la CGT signe les trois quarts des accords d'entreprise soumis à son approbation. Même là où elle est très majoritaire, elle a tendance à signer. En outre, la majorité d'engagement incite les syndicats à constituer des alliances, et la direction à rechercher le compromis.

E & C : Les accords d'entreprise devraient-ils pouvoir déroger aux normes de niveau supérieur ?

J.-M. P. : Ce n'est pas souhaitable du point de vue des salariés et ce n'est, de toute manière, pas vraiment souhaité par les entreprises. Les accords de branche sécurisent les PME qui n'ont pas les compétences pour négocier des accords bien bordés juridiquement. Surtout, les entreprises ont compris qu'elles n'ont pas intérêt à se concurrencer sur les droits sociaux. Ainsi, la possibilité, ouverte par la loi de mai 2004, qu'un accord d'entreprise déroge à un accord de branche n'a pas été utilisée par les entreprises, y compris dans les branches qui ne l'avaient pas interdite. Cette demande patronale est d'abord idéologique et constitue, pour le Medef, une monnaie d'échange face aux syndicats.

E & C : Faut-il réformer la représentativité des organisations patronales ?

J.-M. P. : Oui. Je ne vois pas pourquoi elles passeraient au travers de questions comme celle de l'absence de représentation des entreprises de l'économie sociale ou du fort taux d'abstention des employeurs aux élections prud'homales.

* Coauteur, avec Guy Groux, de La grève, presses de Sciences Po, 2008.

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