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Les pratiques

Peu de remèdes pour les visiteurs médicaux

Les pratiques | publié le : 02.09.2008 |

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Peu de remèdes pour les visiteurs médicaux

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Sanofi-Aventis, Pfizer, GSK, AstraZeneca... Les laboratoires pharmaceutiques compriment leurs réseaux de visiteurs médicaux. Les PSE sont généreux, mais les pistes de reconversion de cette population fragilisée restent peu nombreuses.

D'ici à 2015, 6 000 postes de visiteur médical vont disparaître. C'est le constat dressé, en décembre 2007, par le Leem, qui fédère la plupart des 300 entreprises du médicament. Les raisons de cette érosion sont multiples. Primo, la perte des brevets, tombés dans le domaine public. Les anticholestérols, les antihypertenseurs ou encore les traitements contre le diabète, qui généraient jusqu'ici de fortes marges, accusent le choc. La montée en puissance des génériques explique également ce phénomène. La baisse des prix et les déremboursements décidés par le gouvernement comptent également pour beaucoup. Sous la pression de l'assurance maladie, les médecins ont prescrit moins d'antibiotiques, d'antidépresseurs ou d'anticholestérols. A la demande du gouvernement, les laboratoires ont ainsi dû réduire le nombre de visites de leurs représentants pour promouvoir les produits auprès des médecins.

Restructurations

Résultat ? Les restructurations se multiplient. En juin, Sanofi-Aventis, cinquième laboratoire mondial en chiffre d'affaires et numéro un européen, a annoncé qu'il allait supprimer 700 à 800 postes de visiteur médical en France, soit le tiers de sa force de vente dans le pays d'ici à fin 2008-début 2009. « Au cours de ces cinq dernières années, annonce Pierre Chastagnier, DRH France de Sanofi-Aventis, notre ratio de mise sur le marché de molécules a été divisé par deux. » En même temps, Pfizer, numéro un mondial, a indiqué qu'il allait supprimer 500 emplois sur la période 2008-2011. Le nombre de visiteurs médicaux auprès des généralistes va diminuer de moitié. Le nombre de visiteurs délégués auprès des spécialistes et hospitaliers, d'un quart. Chez GSK, numéro deux mondial, la réduction de postes a été chiffrée à hauteur de 225 sur 1 200. Enfin, chez AstraZeneca, sixième laboratoire mondial, la CFDT a divulgué une suppression de 327 postes de visiteur médical et de leur fonction support, d'ici à 2009, sur un effectif total de 1 526 salariés.

La GPEC pour diminuer la casse sociale

Partout, les services ressources humaines sont en première ligne pour minimiser la casse sociale. Leur méthode ? La GPEC. Un accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences a été signé, dès 2006, chez GSK ; en août 2007, chez Sanofi-Aventis. La direction de ce dernier groupe table sur environ dix-huit mois pour réduire ses effectifs, en donnant la priorité à la reconversion externe. Sanofi-Aventis propose, ainsi, à tout salarié sur le départ le maintien de son salaire (dans la limite de 24 mois), le temps de préparer son projet en étant accompagné (le salaire moyen d'un visiteur médical chez Sanofi s'élevant à 50 000 euros brut par an.) « En cas de sortie du congé avant son terme, précise Pierre Chastagnier, le salarié touche, sous forme de prime, le solde du salaire, jusqu'à dix-huit mois. » Aujourd'hui, la cellule de reconversion a reçu 1 000 appels téléphoniques pour des demandes d'information, ils ont abouti à 400 entretiens avec un consultant et 20 adhésions à un congé de mobilité. GSK mise, de son côté, sur le volet formation pour favoriser les départs. Deux formules sont proposées : une formation d'adaptation de 300 heures (plus 2 500 euros de prise en charge) ou une formation de reconversion de 600 heures (plus 10 000 euros de prise en charge). Par ailleurs, la création d'entreprise est encouragée, avec des formations pouvant aller jusqu'à 600 heures ; 15 volontaires se sont déjà inscrits. La mobilité interne, quant à elle, n'a profité qu'à 10 salariés. Mais cette solution est peu utilisée dans les entreprises pharmaceutiques en raison du faible nombre de postes à pourvoir.

Un outil très prisé : les préretraites

Sans surprise, les préretraites, pourtant pointées du doigt par le gouvernement, sont un outil très prisé des DRH. C'est ainsi que GSK propose des cessations d'activité, trois années avant la liquidation de la retraite à taux plein, avec 70 % du salaire brut. Chez Sanofi, le volet préretraites a déjà été ouvert, en 2006, pour les plus de 55 ans. Chez Pfizer, 120 salariés sont déjà partis en préretraite, en 2007, avec 80 % de leur salaire net. Autant dire que l'annonce de ce nouveau plan social a soulevé l'indignation. Car la profession est jeune.

Les 36/45 ans représentent 43 % des effectifs des 22 702 visiteurs médicaux recensés, en 2006, au travers des demandes de carte professionnelle ; 71 % sont des femmes.

Offres de reconversion

Recrutés à bac + 2, diplômés dans leur spécialité (titre homologué de visiteur médical), les visiteurs médicaux ont un bagage essentiellement scientifique. Quelles sont les opportunités ? C'est là le noeud du problème. La reconversion auprès des pharmacies, la plus facile pour eux, est bouchée. « S'il y a 100 000 médecins en France, il n'y a que 22 000 pharmaciens à visiter », précise Pascal Le Guyader, directeur des affaires sociales de l'emploi et de la formation du Lem. Le paramédical ou le commercial sont d'autres voies de réflexion pour le Leem, qui rendra publique, ce mois-ci, une étude réalisée avec le cabinet BPI, sur l'employabilité des forces de vente. L'organisation professionnelle étudie, actuellement, des passerelles vers les métiers de masseur, esthéticienne, sophrologue, opticien, chargé de relations publiques.

« Un visiteur médical qui a dix ans d'ancienneté touche entre 2 500 et 3 000 euros brut par mois, plus une rémunération variable pouvant aller jusqu'à 20 % du salaire, précise Jean-Luc Roy, visiteur médical à Poitiers. Et on nous offre des reconversions dans des métiers rémunérés à 2000 euros brut. Voilà notre médaille du travail ! »

Et tous les syndicats de pointer du doigt la logique financière adoptée par les laboratoires. « Aujourd'hui, les investisseurs exigent 20 % de profitabilité, s'offusque François Leborgne, de la CFDT, contre 10 % dans les années 1990. » La CGT renchérit : « Le résultat net du groupe Sanofi au niveau mondial, en 2007, a été de 7 milliards d'euros, dont 40 % ont été reversés en dividendes aux actionnaires et 3 milliards ont servi à maintenir le cours de l'action. »

Grogne des professionnels

Du coup, la colère des visiteurs médicaux gronde. Elle a éclaté, le 24 juin, devant le siège de Sanofi, où une centaine de professionnels était présents. Parmi eux, Elie, vingt-cinq ans d'ancienneté, visiteur dans les Pays de la Loire, et qui participe à sa première manifestation, résume le sentiment général : « Nous avons contribué à l'essor de cette boîte. On espérait qu'ils nous laisseraient travailler jusqu'au bout de notre carrière. »

Le Leem plaide, lui, pour une politique de développement industriel, regrettant que la France n'ait pas pris le virage des biotechnologies. Des propositions malheureusement trop tardives pour répondre aux attentes des salariés actuellement sur la sellette.

L'essentiel

1 6 000 postes de visiteur médical devraient disparaître d'ici à 2015, selon le Leem.

2 Reconversions externes, formation, création d'entreprise, mais surtout préretraites sont les principaux outils utilisés par les DRH pour limiter la casse sociale.

3 Les pistes de reconversion ne sont pas légion, même si le para-médical et le commercial sont les plus plausibles.

Le choix de Novartis-France

Les 850 visiteurs médicaux du secteur pharmacie de Novartis France ne connaissent pas la crise. Le numéro trois mondial du médicament a réussi à s'implanter dans le secteur hospitalier grâce à une offre de produits diversifiée. « En 2007, nous avons obtenu, aux Etats-Unis et en Europe, quinze décisions favorables de mise sur le marché, explique Patrick Chertier, DRH France. En Europe, le Lucentis (dégénération maculaire liée à l'âge), le Galvus et l'Eucreas (diabète de type 2) ont été homologués. »

Pour accompagner ces homologations, Novartis-France a repositionné ses commerciaux. Une méthode a été arrêtée après consultation des syndicats qui préfigure une GPEC en préparation. « Nous avions, en 2006, une population de 500 visiteurs médicaux ville, détaille Patrick Chertier, nous en avons fait évoluer, sur la base du volontariat, une centaine vers la visite médicale auprès des hôpitaux et des spécialistes. » Ont été sélectionnés les commerciaux bénéficiaires d'une expertise médicale renforcée et d'aptitudes à parler en public.