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Les pratiques

Allemagne Les entreprises et l'Etat tentent d'éviter les licenciements

Les pratiques | publié le : 20.01.2009 |

Championne des exportations, l'Allemagne est durement affectée par la crise. Comme en France, les entreprises multiplient les dispositifs d'aménagement du temps de travail pour maintenir leur personnel. Jusqu'ici avec succès.

Sur le plus grand site de production de Mercedes-Benz à Sindelfingen en Allemagne, d'où sortent d'ordinaire les rutilantes Classes C, E et S, la production a été fortement réduite. Depuis le 12 janvier, environ deux tiers des 28 000 salariés du site ont été placés en chômage partiel jusqu'au 31 mars. Auparavant, ils avaient été envoyés en «congé forcé» pendant quatre semaines avec tous les salariés du constructeur automobile outre-Rhin, soit environ 150 000 personnes.

Effondrement des commandes

Daimler, qui n'avait pas recouru au chômage partiel depuis quinze ans, n'a pas exclu de prolonger cette mesure au-delà du 31 mars. « Nous avons dû prendre cette décision pour ajuster notre production au net recul de nos ventes, qui ont chuté de 25 % en novembre. Nous ne voulons pas construire des voitures qui resteraient entreposées », explique une porte-parole de Daimler, à Stuttgart. A l'instar de Daimler, la plupart des constructeurs automobiles (BMW, Opel, Ford...) et des équipementiers (Bosch), affectés par l'effondrement de leurs commandes dans le monde, ont négocié avec leur comité d'entreprise des réductions ou des suspensions provisoires du temps de travail pour tenter d'ajuster leur production tout en évitant des licenciements.

Garder la main-d'oeuvre qualifiée

Les autres secteurs ont fait de même. Pour les entreprises du secteur industriel, le maintien du personnel fixe constitue, en effet, une priorité. Car elles ont souffert de la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée pendant la période de forte croissance et essaient, aujourd'hui, de garder aussi longtemps que possible leurs spécialistes en dépit de la récession. Objectif : être prêt à redémarrer pleinement l'activité une fois la crise achevée. Après avoir renoncé à leurs travailleurs intérimaires, la plupart des entreprises ont eu d'abord massivement recours aux comptes épargne temps (Arbeitszeitkonten) de leurs salariés, sur lesquels sont versées les heures supplémentaires effectuées lors des périodes de forte production. En période creuse, ces heures sont reconverties en temps libre. « Au début de la crise, les entreprises disposaient de comptes bien remplis dont elles ont fait pleinement usage », constate Holger Schäfer, expert du marché de l'emploi à l'Institut de recherche économique de Cologne (IW). Ce qui a permis à Daimler de fermer ses usines pendant quatre semaines en fin d'année sans licencier.

400 000 demandes

Aujourd'hui, ces comptes sont souvent épuisés et de nombreuses entreprises ont recours au chômage partiel. Elles doivent en faire la demande auprès de l'Agence fédérale pour l'emploi, qui prend à sa charge entre 60 % et 67 % du salaire net du salarié en fonction de sa situation familiale. « Le nombre de demandes de chômage partiel a fortement progressé en décembre », a annoncé, le 7 janvier, l'Agence fédérale pour l'emploi. Le mois dernier, l'Agence a, ainsi, reçu environ 400 000 demandes, soit quatre fois plus qu'en décembre 2007.

« Cet instrument a été très utilisé au début des années 1990 pour masquer l'ampleur du chômage en ex-RDA au lendemain de la réunification. Il connaît un nouvel essor », souligne Holger Schäfer. D'autant plus que le gouvernement, confronté à une série d'élections en 2009, fait le nécessaire pour inciter les entreprises à l'utiliser. Après avoir allongé, en décembre, la durée légale du chômage partiel de douze à dix-huit mois, la grande coalition a annoncé, le 13 janvier,que l'Agence pour l'emploi prendra à sa charge la moitié des cotisations sociales des salariés au chômage partiel, payées jusqu'ici par les seuls employeurs, voire la totalité contre un engagement de formation de l'entreprise.

Mais les experts sont unanimes : faute d'une reprise, les dispositifs mis en place ne suffiront plus pour éviter des licenciements de masse outre-Rhin, tout comme en France.