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Les pratiques

Un chantier sous surveillance à Lyon après des intoxications au plomb

Les pratiques | publié le : 27.01.2009 |

Interrompu fin septembre à cause d'intoxications de salariés au plomb, le chantier du pont de la Mulatière, à Lyon, vient de reprendre, avec des mesures de protection renforcées.

Début 2009, les sableurs poursuivent le décapage du pont autoroutier de la Mulatière, au sud de Lyon, sous surveillance après une interruption de presque trois mois. Le 25 septembre dernier, en effet, le chantier avait été arrêté par la Direction interdépartementale des routes (Dire) du Centre-Est, le maître d'ouvrage. En cause : au moins sept cas d'intoxication au plomb.

Alerte des médecins

Les médecins du travail avaient alerté l'inspection du travail sur la situation des salariés des sociétés Masci et Chiarizia, les deux PME lorraines de peinture industrielle en charge du marché. « Nous avons trouvé des taux supérieurs aux normes lors d'examens de routine », rapporte le Dr Adrien Ertzscheid, médecin du travail en Moselle. Selon l'inspecteur du travail du secteur, Joël Louis : « Les plombémies étaient supérieures à la limite de 200 microgrammes par litre, qui déclenche une surveillance médicale. Et, pour plusieurs, ce taux s'élevait au-delà de la valeur biologique limite de 400 microgrammes, voire jusqu'à 1 000. Un employé a même présenté des coliques. » Facteur aggravant, ce chantier, démarré en juillet, n'avait toujours pas fait l'objet d'une déclaration préalable en septembre.

Mais comment était-il possible d'ignorer, ou de sous-estimer, la présence de minium de plomb dans cet ouvrage d'art quarantenaire ? D'emblée, une aire de confinement avait été mise en place autour du chantier pour éviter toute diffusion. « Il s'agissait d'être exemplaire pour protéger l'environnement », explique Jean-Claude Trotzier, cogérant de l'entreprise Chiarizia. Mais, remarque le Dr Adrien Ertzscheid, « la protection de l'environnement et celle du travailleur sont parfois concurrentes... Plus les milieux sont confinés, plus les salariés sont exposés ». Ainsi, à l'intérieur de la zone fermée, ni les équipements ni les extracteurs de poussières n'ont permis de protéger les salariés.

« Les dispositions prises par l'entreprise pour assurer la protection des ouvriers vis-à-vis du plomb se sont révélées insuffisantes », relevait la préfecture, en novembre. « Nous n'avions pas été prévenus qu'il y avait une telle quantité de plomb, argue Joseph Masci, gérant de l'autre entreprise du chantier. Certains salariés n'ont pas non plus été assez rigoureux avec l'hygiène. »

Des consignes mieux respectées

Aujourd'hui, après plusieurs mois de concertation entre la Cram, l'inspection du travail, le maître d'ouvrage et les entreprises, et après divers tests pour vérifier l'efficacité des nouveaux extracteurs acquis, le chantier a repris dans de meilleures conditions. La zone de confinement est toujours en place, mais les sableurs respectent mieux les consignes : pause toutes les deux heures, lavage de mains ou douche avant de sortir... Ils portent aussi des cagoules plus hermétiques, reliées à l'extérieur. L'empoussièrement de l'air est mesuré chaque semaine et, surtout, les extracteurs, minutieusement réglés, évacuent 80 000 m3 de poussières par heure, contre seulement 20 000 m3 au début du chantier, avec un indice d'exposition des salariés qui a chuté à 0,03, contre 300 en novembre, lors de tests.

« Les employés sont 10 000 fois moins exposés qu'avant, estime Joël Louis. Avec un degré de protection comparable à celui de l'amiante... » Mais, relève Jean-Claude Trotzier, « on ne parle pas ici de «décontamination» comme pour l'amiante, mais de «décapage»... Et il n'y a pas les mêmes procédures de déclaration. Tout le travail que nous menons aujourd'hui fait de la Mulatière un chantier-école ». Un guide méthodologique doit même être élaboré par les services de l'Etat pour mieux gérer le risque plomb sur les chantiers d'ouvrage d'art.