Depuis quatre ans, l'organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP) organise une campagne de sensibilisation des salariés du BTP aux risques professionnels intitulée «100 minutes pour la vie». Le principe : toucher le plus grand nombre de salariés dans un minimum de temps grâce à une démultiplication de rencontres avec les entreprises sur tout le territoire. Cette année, 360 événements ont ainsi été organisés dans plus de 200 villes de France pendant trois mois ; 4 600 entreprises et plus de 32 000 salariés du BTP y ont participé.

Thèmes retenus en 2009 : chutes de hauteur, risques routiers, troubles musculo-squelettiques, équipements de travail et addictions. Ce dernier thème, en particulier, a été choisi car il répondait à une forte demande des entreprises du BTP. « A la suite de la parution d'un dossier sur le thème des addictions dans la revue de l'OPPBTP de juin 2008, nous avons été submergés par les demandes. Au total, 80 000 exemplaires du livret dédié aux addictions ont été diffusés », indique Gérard Larpent, directeur de la communication de l'OPPBTP.

Pour mieux comprendre la préoccupation de ses abonnés, l'OPPBTP a interrogé les 100 premiers demandeurs du livret. Résultat : 27 % des entreprises avaient des problèmes d'addiction parmi leurs salariés. Problèmes d'alcoolisme, mais aussi de consommation de drogue. L'usage du cannabis est assez répandu et les drogues dites «dures» font aussi leur apparition, la cocaïne, notamment, en raison de la baisse du prix de cette substance.

Dirigeante de MRB Caloresco, une entreprise de plomberie et de couverture de 50 salariés située à Raismes (59), Laurence Bonnet a assisté dans sa région à la rencontre «100 minutes pour la vie» et y a envoyé l'ensemble du personnel d'exécution. Le thème de l'addiction l'a particulièrement intéressée. « Il est important de sensibiliser nos salariés sur les effets pas toujours bien connus des drogues. C'est aussi une prise de conscience pour l'employeur : j'ai appris que le cannabis laissait des traces dans le sang jusqu'à 15 jours après qu'on l'ait fumé. Il faut donc en tenir compte dans nos obligations en matière de prévention des accidents du travail. »

L'entreprise, qui passe beaucoup de marchés avec les collectivités territoriales, embauche régulièrement en CDD des personnes issues de différentes structures comme les Geiq, entreprises d'insertion ou missions locales, en application de la clause d'insertion dans les marchés publics. Elle a déjà été confrontée à l'usage de stupéfiants dans cette population, plus fragilisée.

Suite à l'information délivrée par l'OPPBTP, Laurence Bonnet a pris plusieurs mesures. Dans le cadre de la démarche de sécurité, un classeur sécurité, en cours d'élaboration, intégrera la sensibilisation à la prévention de l'usage des drogues. L'interdiction de consommer du cannabis va être mentionnée dans le règlement intérieur (c'est déjà le cas actuellement pour l'alcool) et sera incluse dans les contrats de travail. Des affiches, basées sur celles de l'OPPBTP, mais retravaillées en interne, vont être posées dans les locaux. Enfin, le thème de la drogue sera présenté lors d'un des «quarts d'heure» sécurité en vigueur chaque mois dans les entreprises du bâtiment.

Pour prolonger les effets de la campagne «100 minutes pour la vie», l'OPPBTP va enrichir son catalogue formation. A partir de septembre prochain, une formation d'une journée à la prévention de l'alcool, des médicaments et des drogues sera proposée aux opérateurs de chantier. Le plus ? Le formateur est un ancien drogué, victime d'un accident du travail. « Une façon efficace de faire passer le message », estime Didier Cotin, responsable de formation à l'OPPBTP.

Depuis l'origine, PRO BTP, groupe de protection sociale des professions du BTP, est partenaire de ces campagnes, ce qui permet d'élargir leur audience. Concrètement, la campagne est annoncée dans les publications de PRO BTP (le groupe compte 3 710 000 adhérents), le site Internet du groupe propose des liens vers l'opération et des bandeaux défilants annonçant la manifestation sont visibles dans les 114 agences-conseils de PRO BTP. Le groupe fournit également toute la documentation nécessaire pour les ateliers de sensibilisation. Lors de la campagne 2007, qui avait recours à des formateurs externes - la Croix-Rouge -, PRO BTP a apporté également une contribution financière.

Pour ces campagnes, l'OPPBTP peut compter aussi sur l'appui de SMA-BTP, caisse d'assurance des entrepreneurs. Actuellement en réflexion : un rapprochement des tableaux de bord OPPBTP/PRO BTP pour évaluer les enjeux économiques de la prévention et montrer aux entreprises quel peut être le retour sur investissement de leurs actions.