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Crise économique et droit social

Enjeux | Chronique juridique par AVOSIAL | publié le : 26.05.2009 |

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Crise économique et droit social

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Les difficultés économiques sont souvent l'occasion de mettre sur la place publique quelques idées critiques ou constructives à l'égard des relations sociales et de la protection sociale.

En ces temps de réduction du volume d'activité, les systèmes consistant en une appréciation du temps de travail autre que la semaine (modulation, annualisation, compte épargne temps, etc.) ont apporté un début de solution avant le recours au chômage partiel, voire pour augmenter son indemnisation, comme l'a proposé récemment une entreprise. Avant de réduire la rémunération ou les effectifs, il faut recenser les solutions pouvant permettre le maintien du salaire ou de l'emploi.

La crise actuelle traverse les relations individuelles et collectives de travail, l'emploi, la protection sociale, etc.

On continue de renouveler les aides à l'embauche : on peut s'interroger sur leur efficacité par rapport au recours, avantageux fiscalement et socialement, aux heures supplémentaires qui, en outre, peuvent être supprimées. De même, il y a longtemps que le contrat à durée indéterminée n'est plus la voie de principe de recrutement.

Il en va de même avec le chômage partiel, qui peut représenter, par salarié, jusqu'à 800 heures indemnisables sur l'année : peut-on avoir des salariés travaillant la moitié de l'année avec une indemnisation partielle de la rémunération ? La crise met en évidence le dilemme entre la baisse de la rémunération et une absence d'emploi indemnisée à plus de 100 % grâce aux prestations Assedic et une indemnité de licenciement majorée, exonérée fiscalement. Il a pu être jugé que la mise en chômage partiel s'imposait au salarié, alors même qu'il y a baisse de la rémunération. Cela explique la demande d'indemnisation à 100 % du salaire perdu du fait des heures non travaillées.

Parallèlement, on sait que les indemnités de licenciement négociées dans le cadre d'un PSE sont exonérées socialement (ou presque) et fiscalement. Un PSE, outre les indemnités de départ, doit s'accompagner de mesures favorisant le reclassement. La rupture du contrat est plus attractive que la réduction de la durée du travail ou la suspension temporaire d'activité !

En d'autres termes, les contradictions apparaissent : l'emploi et le pouvoir d'achat ne vont pas nécessairement de pair.

La politisation des relations sociales fait des partenaires sociaux des acteurs de premier plan : la réponse est-elle nationale et interprofessionnelle ? Relève-t-elle de la négociation de branche ? Ne peut-elle être interne à l'entreprise ? La négociation collective d'entreprise a été substantiellement libérée depuis mai 2004, mais il y a les grands équilibres nationaux.

La portabilité des garanties prévoyance et frais de santé voulue par les signataires de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 le montre avec la mutualisation possible du financement. Les discussions à venir sur le projet de loi relatif à la formation professionnelle en constituent un autre exemple avec la création du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels : comment mobiliser efficacement des fonds au profit de populations fragilisées ?

La richesse du droit social, c'est l'accord collectif, de branche ou d'entreprise, mais sa force obligatoire pour les salariés fait débat. Depuis quelques années, on est passé d'une négociation d'addition à une négociation de substitution, avec un élargissement des dérogations.

Que peut imposer l'accord collectif au salarié pris individuellement ? Les droits tirés du contrat de travail continuent d'être opposables à l'accord collectif, ce qui nécessite de délimiter l'étendue de la sphère contractuelle. Il ne suffit pas de mettre en avant les résultats d'une négociation collective ou d'un référendum organisé par l'entreprise : encore faut-il une acceptation individuelle pour modifier ce qui est acquis ou contractuel.

La négociation collective peut être souple, alors que le contrat de travail est rigide. On retrouve ici le droit de la rupture opposé au droit de la modification du contrat de travail : les partenaires sociaux ont encore à travailler sur ce terrain.

Bruno Denkiewicz, avocat-conseil en droit social, membre d'Avosial, le syndicat des avocats d'entreprise en droit social.