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Les pratiques

Canada Les Maghrébins victimes du modèle québécois

Les pratiques | publié le : 25.08.2009 |

Les immigrants maghrébins peinent plus que tous les autres à trouver un travail au Québec. Le taux de chômage des Nord-Africains est quatre fois plus élevé que celui des Québécois de souche. La situation devrait empirer avec la crise économique.

«Depuis mon arrivée à Montréal, j'ai décroché trois entrevues en trois ans », raconte Noha, une jeune informaticienne marocaine. « Les hommes d'affaires ne reconnaissent pas les diplômes ni les compétences étrangers », ajoute cet Algérien, immigré depuis quatre ans. Des étudiants maghrébins ont récemment porté plainte auprès de la Commission des droits de la personne contre un établissement d'enseignement professionnel montréalais. L'école promettait un taux de placement de 100 %. Là où tous les Québécois de souche trouvaient un stage, les Arabes ne réussissaient à en dénicher aucun.

Chômage

Les exemples sont légion. « Un ingénieur algérien, au Québec depuis 2006, n'a toujours pas travaillé. Son titre est reconnu par l'ordre des ingénieurs, mais il n'a pas trouvé d'emploi, alors que les besoins en ingénieurs sont relativement importants », explique le directeur de l'AMPE-Citi (un organisme français d'aide aux immigrants francophones), Yann Hairaud. La toute dernière enquête de Statistique Canada, issue du recensement de 2006, est étonnante. Alors que le taux de chômage chez les Québécois de souche était, cette année-là, de 6,3 %, il s'élevait à 27,9 % chez les immigrants maghrébins arrivés depuis moins de cinq ans. D'autres études font état d'un taux de chômage de 33 % à 35 %. Les immigrants européens connaissent un taux de chômage de 13,4 %. Il est d'environ 15 % pour les Sud-Américains.

Plus diplômés, moins embauchés

Au-delà des handicaps liés à la découverte d'un pays, le racisme est bien là. La situation des Maghrébins se dégrade. Après cinq années de présence au Québec et bien que plus diplômés que les Québécois, près de 20 % sont toujours chômeurs. Fo Niemi, directeur général du Center for Research Action on Race Relations, confie : « La hausse de l'immigration arabe, le 11 septembre et la stigmatisation antimusulmane expliquent la discrimination. » Si la population maghrébine représente moins de 1 % de celle du Québec, c'est désormais la première immigration dans la Belle Province. Une étude de la Chaire en études ethniques de l'université Concordia de Montréal sur «La discrimination au Québec» souligne que « les gestionnaires de l'administration québécoise ont tendance à privilégier les candidats qui partagent les mêmes repères culturels et linguistiques qu'eux... et à favoriser les candidatures des Québécois de souche. » Si les immigrants représentent 9 % de la population québécoise, ils ne sont que 2 % dans l'administration. L'étude impute ces résultats aux syndicats « qui doivent prioritairement protéger les acquis de leurs membres historiques : les Québécois de souche ».

Le gouvernement du Québec a, depuis des années, mis en place des programmes de discrimination positive dans la fonction publique. Les résultats tardent à venir. Pour empêcher la discrimination dans les entreprises, les CV ne doivent pas indiquer l'état civil, ni comporter de photographie. Il reste cependant le nom du candidat. Un ingénieur agronome marocain, Kamal El Batal, a gagné récemment un procès contre la Coopérative fédérée agricole du Québec. En adressant son CV à cette société, il n'a pas obtenu de réponse, mais en changeant son nom pour «Marc Tremblay», il a obtenu un entretien téléphonique et sa candidature a été retenue...

Certaines sociétés ont pris le taureau par les cornes. Elles proposent des stages pour les immigrants qui peinent à trouver du travail. Mais elles restent une minorité.