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Les entreprises qui assurent

À la une | publié le : 02.05.2017 | Valérie Auribault

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Les entreprises qui assurent

Crédit photo Valérie Auribault

Certaines entreprises ont fait de la responsabilité sociale leur culture, leur ADN. Une autre façon de concevoir l’organisation du travail et de rester attractives.

« Lorsque j’ai créé mon entreprise en 2007, je ne me suis pas dit : « Je vais faire une politique RSE. » La démarche était évidente », explique Dafna Mouchenik, directrice et fondatrice de LogiVitae, société de maintien à domicile pour les personnes âgées et dépendantes. « Si je prends soin de mes auxiliaires de vie, elles se sentent mieux dans un métier difficile, et prennent soin, à leur tour, des personnes dont elles s’occupent », insiste la travailleuse sociale. Maintes fois primée pour sa politique RSE et son approche R& D, LogiVitae permet aux salariées d’évoluer au sein d’une profession où il n’y a, a priori, pas de débouchés. Beaucoup d’auxiliaires de vie sont peu ou pas qualifiées et subissent le temps partiel. Dafna Mouchenik s’efforce de leur proposer un CDI, un temps plein et une formation dans un secteur professionnel où les marges sont pourtant restreintes. Ainsi, certaines d’entre elles ont obtenu un diplôme d’auxiliaire de vie sociale (AVS) par le biais de la validation des acquis de l’expérience (VAE). D’autres sont devenues aides soignantes voire infirmières. « L’une d’elles a choisi de rester au sein de LogiVitae malgré son diplôme. C’est gratifiant de savoir qu’elle ne reste pas faute de mieux », se félicite l’entrepreneure.

La formation et l’égalité des chances, le groupe Stef en a également fait son cheval de bataille. L’entreprise de transport, rachetée en 1993 par ses salariés, a misé sur la diversité de ses équipes. « L’objectif de notre politique sociale est de prévenir les risques professionnels ainsi que d’assurer le développement, la diversité et l’égalité des chances pour les femmes et les hommes. Et ce, dans tous les métiers. Nous mettons ainsi en place des formations adaptées au personnel manutentionnaire afin que celui-ci puisse accéder à la maîtrise des savoirs fondamentaux », explique Serge Capitaine, directeur général délégué du groupe.

Une responsabilité sociale performante.

Les entreprises françaises sont au quatrième rang mondial en termes de politique de responsabilité sociale des entreprises. Selon une étude publiée en mars dernier par EcoVadis et le médiateur des entreprises, 63 % des entreprises françaises affichent une politique RSE « adaptée ou exemplaire », selon l’étude. Et ce, dans différents domaines. L’entreprise de location de matériel Kiloutou a mis l’accent sur la sécurité de ses 3 500 salariés. Une démarche RSE qui compte diverses actions, de la plus simple (ranger les agences et ateliers) aux plus complexes et responsables. Parmi ces dernières, on trouve la formation des clients aux engins en location, l’accueil et l’intégration des nouveaux collaborateurs dans un parcours de formation ou encore l’embauche de jeunes en insertion à travers l’école de l’entreprise qui forme spécifiquement aux métiers de la société. L’emploi, un volet tout particulièrement développé dans la politique RSE de l’entreprise solidaire Gecco. La société lilloise, qui transforme les déchets de la restauration en énergies renouvelables pour les territoires, œuvre aux côtés des collectivités à la maîtrise des coûts des énergies et au développement de l’emploi local. Gecco teste actuellement le principe de l’holacratie, un mode de gouvernance basée sur la responsabilisation des salariés. Une voie qui motiverait ces derniers à relever des challenges et à se sentir davantage impliqués, au même titre que l’entreprise libérée. Pour autant, Christophe Gotteland, conseiller en développement durable et responsabilité sociétale, met en garde : « Le concept de l’entreprise libérée et de l’autonomie ne correspond pas à tout le monde. Certains salariés sont déboussolés et se retrouvent en souffrance. Surtout lors de la phase de transition de la société. L’entreprise libérée peut parfaitement rater le virage de la RSE si elle n’est pas suffisamment à l’écoute de ses salariés. Contrairement à une entreprise plus classique avec des principes RSE objectifs. »

Réunir toutes les parties prenantes.

Une démarche RSE qui fonctionne est le plus souvent impulsée par le dirigeant de l’entreprise et motivée par une véritable adhésion. « Collaborateurs, clients, fournisseurs… tous doivent être sensibilisés à la politique RSE de l’entreprise, rappelle Gilles Vermot Desroches, directeur du développement durable chez Schneider Electric. Un échange avec toutes les parties prenantes est impératif. » L’entreprise énergétique, qui emploie des personnes en situation de handicap bien au-delà des obligations légales, travaille de concert avec les partenaires sociaux. « La RSE est un guide des bonnes pratiques. Pour que ces nouvelles habitudes soient comprises de tous, le dirigeant doit y associer la transparence et l’exemplarité, insiste Christophe Gotteland. Si un manager méprise le personnel, la RSE ne fonctionnera pas. » Impliquer les délégués du personnel ou les syndicats participe à cette réussite. « J’ai des contacts privilégiés avec la direction, admet Severin Beuzeboc, délégué syndical CFTC chez Somfy et élu CHSCT. Nous échangeons, ensemble, sur les pistes à explorer. Par exemple, depuis peu, Somfy a créé une place sur Placedelaloc.com. À travers ces échanges, on crée du lien social entre les salariés ou on favorise la rencontre avec d’autres collaborateurs de l’entreprise que l’on n’a pas l’habitude de croiser. J’en gère le site. C’est une démarche positive. » Autre démarche positive chez Gecco, la réunion d’équipe. Une fois par mois, cette réunion permet de présenter les orientations stratégiques et les résultats de l’entreprise à l’ensemble du personnel, de consulter les salariés sur des choix d’organisation, d’amélioration ou les évolutions à mettre en place. Cette organisation est de première importance pour Christophe Gotteland, qui dénonce l’impréparation chronique des entretiens annuels : « S’ils sont bien faits, c’est bénéfique. Mais ils sont trop souvent dévalorisants pour le salarié. » Sycomore Asset Management, qui a été récompensée d’un trophée Défis RSE 2016 pour sa finance responsable, veille tout particulièrement à la préparation de ces entretiens. « Les collaborateurs sont prévenus de l’entretien plus d’un mois à l’avance. Ils reçoivent un questionnaire afin de s’y préparer et faire leur auto-évaluation, explique Bertille Knuckey, responsable recherche ESG (environnement, social et gouvernance) au sein de la société de gestion d’actifs. Lors de l’entretien, nous évoquons les réalisations sur l’année, ce qui a marché ou pas, les demandes de formation et la rémunération. Mais ces entretiens sont plus une formalité qu’autre chose. Car nous échangeons chaque semaine et nous restons à la disposition des plus jeunes qui ont davantage besoin d’être guidés et accompagnés. Et un « one to one » est toujours possible. »

Source de créativité.

Les grands groupes du CAC 40 se distinguent également par leur politique RSE. « Les chefs d’entreprise ont compris depuis longtemps l’intérêt d’avoir des salariés épanouis au travail. Cela est source de bon fonctionnement, de créativité. Mais aussi de moins d’absentéisme ou de turnover. L’absence de démarche RSE a un coût social », rappelle Nora Barsali, consultante responsabilité sociétale des entreprises, présidente de News RSE et fondatrice des trophées Défis RSE. « La politique RSE rend une entreprise attractive dans le monde entier et attire ainsi de nouveaux talents. Elle permet aussi de les fidéliser », souligne Gilles Vermot Desroches.

Aujourd’hui, la France n’a pas à rougir de ses entreprises, qui sont souvent à la pointe de la RSE, selon le baromètre 2017 du Reputation Institute. Danone, Veolia ou encore Michelin y sont parmi les mieux notées. Pour autant, Michel Chevalier, délégué syndical central CGT chez Michelin rappelle qu’en « 2009, l’entreprise avait reçu le prix Pinocchio » par l’association Les Amis de la Terre, tout comme EDF, BNP Paribas ou encore Total ces dernières années. Des entreprises qui se targuent parfois d’avoir une politique RSE. « Michelin communique beaucoup, estime Michel Chevalier. Mais la CGT était intervenue en 2012 pour dénoncer le travail de nuit des femmes en Inde. Sans parler des déforestations et des populations déplacées pour la construction d’une usine. En France, les conditions de travail peuvent être difficiles. Avec des temps de récupération très courts entre le travail de jour et de nuit et les week-ends. Nous ne sommes pas écoutés. Les dirigeants annoncent que « les gens sont contents ». Mais lors des réunions, les salariés viennent exposer leurs idées et repartent avec celles du patron. » Christophe Gotteland le reconnaît : « Il y a encore beaucoup de travail à faire en matière de RSE. »

Auteur

  • Valérie Auribault