logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Décodages

Michel Offerlé : “Les organisations patronales avaient très largement surestimé leur nombre d’adhérents”

Décodages | publié le : 05.06.2017 | N. L.

Image

Michel Offerlé : “Les organisations patronales avaient très largement surestimé leur nombre d’adhérents”

Crédit photo N. L.

La pesée de la représentativité patronale a livré son verdict sur le nombre réel d’adhérents des organisations professionnelles. Quels en sont les enseignements ?

Le premier constat qui n’a guère été tiré par la presse, est que les confédérations avaient très largement surestimé leur nombre d’adhérents. Jusqu’à présent, le Medef affichait 750 000 adhérents, la CPME 550 000 et l’UPA 300 000, avant l’accord avec l’UNAPL. Or la DGT leur attribue, respectivement, 123 000, 145 000 et 150 000 adhérents. Idem pour certaines fédérations : l’Umih (hôtellerie-restauration), qui se revendiquait comme la plus importante, passe de 80 000 adhérents déclarés à 30 000 constatés. Deuxième fait marquant : le monde patronal est inégalement divisé en six. D’abord les 3 centrales représentatives (l’UNAPL étant agrégée à l’UPA), puis la FNSEA et les composantes de l’Udes (économie sociale et solidaire). Mais on trouve aussi une sixième composante invisible, les non-confédérés, dans des branches diverses. Presque toutes celles relatives à la culture (y compris l’audiovisuel), le nautisme, la dératisation, les pompes funèbres ou encore le principal syndicat du caoutchouc.

La première mesure d’audience de la représentativité patronale conforte-t-elle la prééminence du Medef ?

Cette prééminence n’est pas une surprise. Le pouvoir politique, voire les centrales syndicales ont besoin d’une organisation générale et généraliste, qui équilibre le jeu partenarial patronal. Les résultats issus de ce grand Meccano comptable sont donc un compromis entre un décompte statistique partiellement robuste et un chiffre purement politique. Car les fédérations qui appartiennent à plusieurs confédérations ont choisi des clés de répartition de leurs adhérents selon des critères politico-institutionnels, bien plus que sur les montants des cotisations versés à chaque confédération.

La FFB (Fédération française du bâtimenta ainsi attribué 45 % de ses adhérents à la CPME et 55 % au Medef, alors que sa cotisation à la CPME est dix fois inférieure à celle qu’elle verse au Medef. Le rapport Combrexelle de 2013 annonçait clairement la couleur : « On va essayer de consolider la stabilité du partenariat patronal (…), sans bouleverser les équilibres. »

La CPME paraissait en mauvaise posture, elle maintient globalement ses positions. Comment l’expliquez-vous ?

La CPME est une structure partiellement creuse mais une bannière politiquement utile pour faire exister une entité aussi floue qu’évidente : les PME. Une partie des structures adhérentes à la CPME ne sont pas représentatives. Le gros des effectifs de la CPME vient de fédérations adhérentes à plusieurs confédérations. Même s’il s’agit d’entreprises petites et moyennes, elles n’ont pas les moyens – politiques et financiers – de s’émanciper des grandes, et donc du Medef. La force de la CPME réside dans le crédit que lui confère le pouvoir politique et d’une présence réellement militante dans quelques métropoles régionales.

Le score réalisé par l’U2P n’est-il pas très en deçà des espérances de ses dirigeants ?

L’U2P a tenté de réagir aux négociations entre Medef et gouvernement sur les critères de la représentativité (nombre d’entreprises ou nombre de salariés) en élargissant son périmètre : UPA 300 000 adhérents + UNAPL 110 000 devait faire 410 000. Certes, elle est la première centrale en termes d’adhérents, avec 150 605 cotisants agrégés, mais elle a pâti de clés de répartition très défavorables de la part des fédérations affiliées à plusieurs confédérations. En outre, certaines fédérations notamment de l’Unapl ont peiné à faire remonter les données relatives aux adhérents et à leur nombre de salariés, affectant le score global de l’U2P.

Le poids du nombre d’adhérents dans la représentativité patronale peut-il susciter une course aux adhésions dans la perspective de la prochaine mesure en 2021 ?

Certaines fédérations et unions territoriales ont depuis longtemps dégagé des crédits pour des développeurs, sortes de VRP à la recherche de prospects adhérents, à l’instar de la FFB. D’autres ont suivi et la perspective de la toise représentative de 2017 a attisé les concurrences. Le Cinov (ingénieurs-conseils), affilié à la CPME, a doublé son taux d’adhésion en cinq ans. Mais ces actions nécessitent des moyens et des enthousiasmes que n’ont pas, la plupart du temps, des organisations souvent faibles… et qui ne cherchent que rarement à se regrouper et à fusionner pour former des entités plus solides.

Auteur

  • N. L.