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Le bloc-notes

Réduire le sentiment croissant d'insécurité

Le bloc-notes | publié le : 01.05.1999 | Catherine Barbaroux

Maîtriser l'incertitude

C'est aujourd'hui l'enjeu le plus fort dans les entreprises. Cernés par les changements d'orientation stratégique, d'organigramme, d'organisation, les salariés tiennent plutôt bien. Mais pour combien de temps encore, si on ne prend pas en compte leur sentiment croissant d'insécurité. Déjà, dans les entreprises, y compris publiques, où les transformations se conduisent à marche forcée, les crispations s'aggravent, ébranlant parfois les « encadrants » de proximité, qui ont à les expliquer et à les appliquer sans toujours les comprendre.

Il est grand temps de donner une consistance contractuelle à cette confrontation inévitable à l'incertitude. Certains, au Medef, comme dans les organisations syndicales, y sont prêts : les objets de négociation ne manquent pas tant les ruptures sont fortes en termes de temps et d'organisation du travail, de rémunération, d'adaptation et de développement des compétences. L'élargissement et la décentralisation du dialogue social en sont une étape nécessaire. À condition de légitimer, de former et de donner de réelles marges de choix aux acteurs comme aux salariés eux-mêmes.

Restructurations

Ce sentiment d'incertitude se nourrit, bien sûr, des mouvements de fusions-acquisitions, qui se succèdent sans répit. Ce rythme et cette ampleur ne sont pas prêts de s'atténuer même si surgissent déjà des critiques sur les méfaits du gigantisme ou la non-atteinte dans près de 70 % des cas des objectifs de rentabilité escomptés.

Les préconisations de bon sens ne manquent pas pour guider les directions d'entreprise et les DRH dans ces phases de transition à haut risque, entre un passé non encore aboli et un futur non encore dessiné. « Il est de plus en plus vrai que l'entreprise est une communauté morale qui passe par une discontinuité forte », selon la formule du PDG de Lafarge, Bertrand Collomb. Aucune marche à suivre ne peut supprimer le caractère fondamentalement aléatoire d'un processus de fusion, fait de phases d'immobilisme prolongé, d'accélérations soudaines, d'annonces, puis de contre-annonces. C'est dans cette prise en charge de l'incertain que résidera la valeur ajoutée de ceux qui pilotent le changement. Mais ils ont le droit, le devoir d'exiger que se réduise l'opacité entre le financier et le social : les fusions s'accompagnent presque toujours de la destruction de certains emplois mais aussi de transferts ; il en résulte une tendance à la précarisation des emplois restants et certaines catégories sont plus affectées que d'autres. À quoi bon nier cette évidence que tous les salariés observent. Il n'est cependant pas impossible d'en atténuer les conséquences de manière anticipée, équitable, voire aussi « sécurisante ».

Suites du rapport Charpin

Pour que la retraite soit à 60 ans, peut-être faut-il la porter à 65 ans ! Les carrières complètes sont l'exception et les préretraites décidées par les entreprises ignorent les évolutions démographiques de plus long terme. De ce point de vue, on parle beaucoup de l'allongement des durées de cotisation et peut-être pas assez de l'atténuation des coefficients d'abattement en cas de départs anticipés. Bâtisseur de pyramides des âges en entreprise va devenir une mission d'utilité publique si l'on veut sortir du dilemme des préretraites décidées au plan micro et des grands (dés)équilibres gérés au plan macro. D'autant que, dans quelques années, la fidélisation des personnels en fin de carrière s'imposera par des tensions sur le marché du travail. Encore faudra-t-il avoir su entretenir le dynamisme professionnel des « vieux » de 55 ans !

Serait-il impossible de réussir en France ce que presque tous les pays développés ont réalisé, avec du temps certes, mais en créant un consensus entre partenaires pour sauver l'avenir de leurs régimes de retraite, du Canada à l'Italie, des Pays-Bas à l'Allemagne, de l'Espagne au Japon… Sur ce sujet comme sur d'autres, les partenaires sociaux français peuvent-ils nous surprendre comme le font la CGIL qui réclame la « privatisation des relations du travail et l'abolition du statut de la fonction publique », les Pays-Bas qui « privatisent » l'assurance chômage ou le patronat allemand, qui finit par accepter la relance par les salaires. Rien évidemment n'est comparable ni imitable. Mais la meilleure défense n'est-elle pas l'audace ?

35 heures

Les contours de la seconde loi se dessinent et laissent finalement peu de place à l'incertitude si le cahier des charges que s'est donné le gouvernement est respecté : entre le cadre juridique (notamment communautaire), la jurisprudence et surtout les enseignements des accords collectifs, l'aire de jeu se précise. Il pourrait être possible de négocier la loi… ou de légiférer sur la négociation en bonne intelligence.

Auteur

  • Catherine Barbaroux