Interview de Jean-Philippe Roquelle, chargé de mission du Crapt-Carrli (1) de Strasbourg.
L'illettrisme touche environ 10 % de la population active et frappe surtout les salariés faiblement qualifiés, travaillant dans l'industrie, le bâtiment ou le nettoyage. Mais tous ceux qui n'utilisent pas régulièrement les savoirs de base – écriture, lecture, calcul – peuvent se retrouver en situation d'illettrisme quand leur poste de travail évolue. Ainsi, quand les entreprises métallurgiques ont mis en place des certifications qualité, les ouvriers, qui avaient une culture de transmission des connaissances orale, ont dû décrypter et rédiger divers documents écrits. Certains ont été déboussolés, car ils n'avaient pas l'habitude d'utiliser ces savoirs de base.
Beaucoup ignorent que certains de leurs salariés sont illettrés. Mais, peu à peu, le sujet sort de l'ombre. Avant, l'entreprise considérait que l'illettrisme au travail ternissait son image de marque. Les bas niveaux de qualification faisaient systématiquement partie des plans sociaux. Aujourd'hui, quelques-unes – Sollac ou Kraft Jacobs Suchard – forment ces salariés car elles s'aperçoivent que l'illettrisme constitue un frein à la croissance, à la qualité.
Notre objectif est d'inciter les partenaires sociaux – entreprises, syndicats – à lutter contre l'illettrisme au travail. Pour cela, nous diffusons auprès des sociétés un « mémento pour agir », qui décrit les actions à mener. Nous rencontrons des DRH, des dirigeants qui ont repéré des cas d'illettrisme, les conseillons et les orientons vers les organismes de formation compétents.
(1) Centre régional d'appui pédagogique et technique-Centre d'appui et de ressource régional de lutte contre l'illettrisme.