Dans le recrutement, l'externalisation ne sera jamais totale. Pour Patrick Houry, directeur de missions chez Accenture et spécialiste des ressources humaines, elle recouvre en fait une gestion déléguée portant sur une ou plusieurs étapes du processus de recrutement. « Rédaction des annonces, gestion des candidatures spontanées, présélection des CV, sélection de candidats, chasse de têtes… toutes ces activités peuvent être sous-traitées, précise ce spécialiste. Mais l'entreprise conservera toujours ses compétences stratégiques. » À commencer par… la décision d'embauche. …« Dans l'activité de recrutement classique, précise Dorian Penner, responsable de l'activité recrutement chez Merlane Outsourcing, le consultant présente des candidats à son client et se fait payer à l'embauche effective. » Mais, précise-t-il, « c'est de la simple sous-traitance, pour cause de manque de temps ». Et de coût moindre : quand une entreprise estime obtenir le même service moins cher en externe, elle fait appel à un partenaire. Toutes les tâches, à l'exception de la validation finale des candidats, peuvent être externalisées : le conseil sur la définition des besoins en amont, les annonces, la gestion des candidatures et des réponses, la chasse et le suivi durant la période d'intégration.

Pour Hervé Farret, responsable du recrutement et de la communication interne chez Xerox, Internet est largement responsable de cette évolution. « Avec Internet, l'acte de recruter a été désacralisé. Il est devenu plus direct et moins formel. Toutes les candidatures que nous recevons sont traitées sur un circuit électronique – 75 % des CV arrivent via le Net et les 25 % restants sont scannés. » Un tout informatique qui a vraisemblablement facilité l'externalisation. Xerox a ainsi demandé à un prestataire de mettre en place une solution d'e-recrutement pour ses commerciaux, poste essentiel de recrutement. Après un appel d'offres, le choix s'est porté sur PlanetCareer, qui a créé le dispositif et en assure la gestion : procédé d'information sur le terrain, de circulation, de mise sur l'extranet et de retour des candidatures. Celles-ci sont suivies en temps réel, ce qui accroît la réactivité – son amélioration est visible depuis juillet 2001, date de mise en place de la solution. Les candidatures présélectionnées parviennent directement à la vingtaine de personnes chargées du recrutement, via l'extranet, et sont ensuite envoyées aux concessionnaires du groupe, qui ont le dernier mot. « Compte tenu de la forte saisonnalité dans notre recrutement, le coût d'investissement et de maintenance d'une internalisation serait gigantesque », conclut Hervé Farret.

L'externalisation du recrutement n'est pas toujours aussi intégrée. Les freins psychologiques et culturels restent significatifs, et la législation française est toujours restrictive sur le transfert d'activités. Quant au recours aux cabinets de recrutement classiques, qui s'apparente davantage à un achat de services, il suit l'évolution du marché de l'emploi et tend actuellement à se tasser légèrement.

L'équation financière n'est pas non plus toujours favorable à la sous-traitance. « Nous faisions appel à un cabinet de recrutement depuis dix ans, témoigne le chef du recrutement d'un groupe de distribution. Mais, avec plus de 100 recrutements annuels de responsables de points de vente, le budget externalisation était devenu trop important. L'embauche d'un salarié supplémentaire chargé du recrutement s'avère finalement moins coûteuse. » Paradoxalement, le développement de l'informatique et d'Internet peut aussi être un facteur… de réinternalisation. Pour Patrick Houry, l'apparition sur le marché de logiciels de recrutement performants facilite le retour de certaines tâches : « Les entreprises demandent à leurs prestataires de mettre en place des dispositifs de gestion des candidatures qui pourront être pilotés facilement en interne. »