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Les salariés n'épargnent pas assez

Dossier | publié le : 01.12.2002 | B.Q.

Les entreprises britanniques tentent de réduire les coûts de leurs plans de retraite. Alors même qu'il manque actuellement 45 milliards d'euros dans les caisses pour garantir, demain, une retraite correcte aux travailleurs britanniques.

C'est le dernier exemple en date d'un nouveau type de conflits sociaux outre-Manche : le syndicat Amicus des employés de la compagnie d'assurances Prudential menace de faire grève pour protester contre le projet de la direction de ne plus faire bénéficier ses nouvelles recrues de son plan de retraite maison, indexé sur le dernier salaire. Un projet caressé par de nombreux employeurs depuis un an, tels Marks & Spencer ou la banque Lloyds. Et pour cause : depuis la dégringolade boursière, la contribution des entreprises britanniques aux fonds de pension de leurs employés a considérablement augmenté. Quasiment nulle au cours des années 90, elle représente aujourd'hui près du quart de la masse salariale… En lieu et place de son système à prestations définies, Prudential envisage de mettre sur pied un plan à cotisations définies, alimenté par une cotisation de 6 % du salaire à la charge de ses employés et qu'elle abondera à hauteur de 200 %. Un dispositif moins coûteux pour sa trésorerie, mais plus risqué pour ses collaborateurs. D'où la colère d'Amicus, pourtant considéré comme l'un des syndicats britanniques les plus modérés. Les retraites figuraient en tête des revendications du récent congrès du Trades Union Congress (TUC). La puissante centrale syndicale britannique, très remontée contre les chefs d'entreprise qui ne s'imposent pas la même cure d'austérité pour leurs propres retraites, suspecte certains employeurs de répondre à la demande d'actionnaires de plus en plus préoccupés par le coût de ces fonds de pension trop rigides. Le TUC est d'autant plus inquiet que les nouveaux régimes mis en place font dépendre en grande partie le montant des pensions de l'évolution des cours de Bourse.

Côté syndical, on attend donc du Premier ministre Tony Blair qu'il impose un système complémentaire obligatoire. Les entreprises seraient contraintes de participer au financement des retraites de leurs employés, à hauteur de 10 % des salaires. Une proposition rejetée par le CBI, la principale organisation patronale, qui a mis en garde le gouvernement contre une telle mesure, particulièrement pénalisante pour les PME. « Nous ne pensons pas que ce soit la bonne solution. Il vaut mieux créer une structure qui incite employeurs et employés à épargner plutôt que de les y obliger », estime David Astley, l'un des directeurs de la National Association of Pension Funds (Napf). Pour l'instant, le gouvernement Blair, dont le Livre blanc sur les retraites doit être publié d'ici à Noël, s'est contenté de créer un système dit de stakeholder : dans toute entreprise d'au moins cinq salariés, le personnel a le droit de demander à bénéficier d'un fonds de pension géré par un prestataire extérieur. Seul bémol, l'employeur n'est pas contraint de participer à son financement. D'où le succès encore très limité de ce dispositif.

Crise de confiance à l'égard des assurances

Dans un récent rapport, la Napf rappelle pourtant que les sommes épargnées par les salariés sont largement insuffisantes pour leur garantir une retraite correcte : il manque en caisse quelque 28 milliards de livres, soit 44 milliards d'euros. « Le problème, c'est que les Britanniques, et en particulier les jeunes, économisent peu. Les niveaux de cotisation sont dramatiquement bas, s'alarme une analyste indépendante. En haut de l'échelle, les salariés les plus aisés diversifient leurs placements, en particulier dans l'immobilier, alors que les employés à bas salaires ne peuvent pas économiser et dépendent presque intégralement du système public par répartition. Reste le problème des classes moyennes, qui devraient cotiser par l'intermédiaire de fonds de pension d'entreprise. »

Outre une augmentation de l'âge de la retraite (de 65 à 70 ans), la Napf propose une simplification du régime public. « Le système est trop complexe. Du coup, comme les gens ne savent pas quel sera le montant de leur retraite publique, ils ne sont pas incités à faire des économies par le biais de leurs employeurs, explique David Astley. Il existe, en outre, un climat de suspicion à l'égard des assurances et de l'épargne. » Les scandales de certaines assurances vie, accusées de tromperie sur les montants promis dans les contrats, n'encouragent guère les Britanniques à épargner. Une crise de confiance qu'amplifie la chute de la Bourse. Car, outre-Manche, ces contrats dépendent massivement du cours des actions. De nombreux assureurs ont réagi en transformant leurs portefeuilles d'actions en obligations, mais aussi en réduisant les bonus payés aux assurés et en augmentant les pénalités pour ceux qui mettent fin à leurs contrats avant échéance. Des mesures qui ne risquent pas d'améliorer la confiance du public dans les systèmes d'épargne retraite…

Auteur

  • B.Q.