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Vie des entreprises

Les vendeurs de Darty font des envieux chez son rival Boulanger

Vie des entreprises | MATCH | publié le : 01.02.2003 | Stéphane Béchaux

Dans un marché devenu morose, le leader du secteur, Darty, tire mieux son épingle du jeu que son challenger, Boulanger. Primes, intéressement, participation… ses salariés sont un peu mieux lotis. Ce qui n'empêche pas un fort turnover. Un fléau contre lequel Boulanger s'efforce de réagir en renforçant les processus de formation et d'intégration.

À quelle sauce seront mangés les 12 000 salariés de Darty ? Prévue depuis plusieurs mois, la cession de Kesa, le pôle électroménager de l'anglais Kingfisher, dont le distributeur hexagonal est l'enseigne phare, devrait être bouclée dans les prochaines semaines. Une restructuration qui concerne aussi les magasins But, Comet (Grande-Bretagne) et ProMarkt (Allemagne). Au sein des 193 magasins Darty, la question n'agite guère les esprits. Non seulement parce que l'inventeur du « contrat de confiance » se porte globalement bien et n'a donc pas grand-chose à redouter d'un changement de propriétaire, mais aussi parce que la précédente reprise, en 1993, s'était faite sans vagues. « L'arrivée de Kingfisher n'a rien changé, assure Alain Dureuil, de la CFE-CGC, à l'époque directeur du magasin parisien des Ternes. Aucun dirigeant britannique n'est jamais venu nous donner des conseils. C'est même le contraire qui s'est produit. »

Valorisé aux alentours de 2 milliards d'euros par les banques d'affaires, Darty est aujourd'hui le leader incontesté de l'électroménager en France. Mais l'enseigne, créée en 1957 à Montreuil par Marcel Darty et ses trois fils, est à la recherche d'un second souffle : elle évolue sur un marché mature, très concurrentiel, et plutôt morose. Sur les dix premiers mois de 2002, le distributeur a subi un recul de 4,7 % de ses ventes. Et 2003 ne s'annonce pas meilleur.

Pour Boulanger, son challenger, l'équation est sensiblement la même. Créée en 1954, à Lille, par deux frères, Bernard et Gustave Boulanger, l'enseigne a d'abord prospéré dans le nord de la France. « Pendant plus de vingt ans, il y a eu une sorte de modus vivendi territorial entre Darty et Boulanger, raconte Alain François, DRH du groupe nordiste. Le jour où Darty a brisé cet accord tacite en s'implantant dans le Nord, Boulanger a décidé d'en faire autant en région parisienne. » Avec moins de succès. Propriété, depuis 1986, de la famille Mulliez, fondatrice d'Auchan, le groupe, qui a connu une très forte expansion à la fin des années 90, compte aujourd'hui 4 500 salariés et 70 magasins en France, sans compter quatre unités espagnoles. Soit, au total, un peu plus que Darty sur la seule Ile-de-France.

Ici, c'est un peu le McDo !

C'est au centre commercial de Parinor, à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), que la concurrence entre les deux distributeurs est la plus visible : une seule cloison sépare les deux enseignes, côte à côte dans la galerie marchande. Une situation unique en France, qui facilite les allers-retours des clients… et des salariés. Depuis l'année dernière, trois vendeuses du rayon électroménager ont quitté Boulanger pour rejoindre Darty. Des désertions qui témoignent du ras-le-bol des salariés de l'enseigne lilloise. « Ici, c'est un peu le McDo. Ça va, ça vient. Les gens s'en vont au bout de quelques mois », témoigne un « ancien » d'à peine 25 ans qui, en cinq ans chez Boulanger, a vu passer quatre directeurs et la quasi-totalité du personnel renouvelée. « On perd tous nos bons éléments et la direction ne fait rien pour les retenir. On dépense énormément d'argent pour les formations et, au final, c'est Darty qui récupère la mise », se désole Franck Gourdin, vendeur de gros électroménager à Aulnay et délégué syndical CFDT.

Chez Boulanger, les difficultés remontent à l'année 2001. L'enseigne, qui doit alors gérer douze ouvertures de magasins et deux transferts, subit de plein fouet le coup de frein sur la consommation, après quatre années fastes. Au printemps, la direction procède également à la mise en service d'un nouveau système informatique. Baptisé Radar, ce nouvel outil multiplie, pendant plusieurs mois, bugs et pannes, au point d'obliger les équipes à ressortir crayons, gommes et calculettes. Pour ne pas pénaliser ses vendeurs, payés à la commission, la direction n'a eu d'autre choix que de les rétribuer, pendant trois mois, sur la moyenne de leurs dernières rémunérations. « La mise en place de Radar a complètement désorganisé l'entreprise pendant un an, avec trois mois très critiques », reconnaît-on au siège de Lesquin, dans le Nord. Aujourd'hui, la majorité des problèmes est surmontée. Mais la note est salée : 15 millions d'euros, soit plus du double du devis initial…

Autre sujet de mécontentement des vendeurs de l'enseigne lilloise, les rémunérations. Chez Boulanger comme chez Darty, ils touchent des commissions sur les ventes, variables d'un produit à l'autre en fonction de la marge, du niveau des stocks, de l'ancienneté du produit, de l'éventuelle souscription d'une extension de garantie, etc. Chez Boulanger, le compteur est remis à zéro en début de mois. Et le salaire est l'addition des primes. Si celles-ci sont inférieures au minimum conventionnel, qui varie de 1 100 à 1 300 euros brut en fonction de l'ancienneté et des qualifications, l'entreprise complète. Chez Darty, le principe est sensiblement identique, mais les vendeurs ont un fixe, dont le montant varie selon les régions : il est d'environ 400 euros sur les bords de la Méditerranée, de 600 euros dans l'Ouest et de 800 euros en Ile-de-France. Des disparités qui n'ont rien à voir avec le coût de la vie, mais avec l'organisation très décentralisée de l'entreprise, découpée en sept filiales régionales, qui définissent chacune leur politique sociale.

La faute aux 35 heures

Il y a encore deux ans, en période faste, le système de rémunération ne posait, chez les Mulliez, guère de problème. « Boulanger payait très bien. Les vendeurs pouvaient gagner jusqu'à 4 500 euros net en décembre. Mais, aujourd'hui, plus de la moitié sont au minimum garanti », assure Pierre Engels, de la CGT. « Le système de rémunération est dépassé, abonde un vendeur. Dès le 15 du mois, on sait parfaitement qu'on n'arrivera pas à aller au-delà du plancher. Alors, on arrête de se battre. » Au dire des organisations syndicales comme des salariés, la faute en incombe aux… 35 heures, mises en place au début de l'année 2001, avec l'aval de la seule CFTC. « Avant, personne ne contrôlait les horaires. Ça nous arrivait tous de faire des semaines de cinquante heures. Ceux qui n'en faisaient pas autant se mettaient hors-jeu », soutient Christian Bar, vendeur de télés et délégué syndical FO. « L'arrivée des badgeuses a été un choc culturel et organisationnel pour les vendeurs, qui ont une mentalité d'indépendants, reconnaît Alain François, le DRH. Mais nous avons réussi à leur maintenir des niveaux de salaire comparables, en optimisant temps de présence et temps de vente. Seuls certains ténors, qui gagnaient beaucoup d'argent en travaillant beaucoup, y ont perdu. » Ce qui n'empêche pas la direction de réfléchir à une refonte de sa politique de rémunération.

Dans l'enseigne lilloise, les 35 heures se sont traduites pour les vendeurs par des semaines de cinq jours, au lieu de six précédemment. Les horaires peuvent fluctuer, en fonction des périodes d'activité, entre vingt-huit et quarante-deux heures. En théorie tout au moins, car, selon les syndicats, certains vendeurs continueraient à draguer le client pendant leur pause de midi, avec l'accord implicite de leur hiérarchie. Les caissières et les magasiniers, passés aux 35 heures par semaine, sont plutôt « réglos ». Payés autour du smic, sans part variable, ils ont tout lieu de se satisfaire de l'arrivée des badgeuses. De même que les techniciens du service après-vente qui, en travaillant trente-sept heures hebdomadaires, ont gagné douze jours de repos. Quant aux cadres au forfait, ils doivent dorénavant deux cent quatorze jours par an à l'entreprise.

Chez le concurrent Darty, la RTT s'est faite en douceur, mais sans enthousiasme. « Notre métier n'est pas compatible avec des horaires de Sécurité sociale, souligne Christian Brière, le DRH groupe. Les accords de RTT ont mis à mal les arrangements gagnant-gagnant qui existaient dans les magasins. » D'où des résistances locales, qui obligent parfois les directions régionales à jouer les inspecteurs du travail… Tout au moins lorsqu'elles sont concernées par les lois Aubry. Trois filiales – celles du Nord-Pas-de-Calais (600 salariés), de l'Ouest (1 600 salariés) et de Normandie (600 salariés) – n'ont en effet pas réussi à s'entendre avec leurs syndicats. « On n'en a pas voulu car la direction nous proposait une modulation à outrance, de vingt-quatre à quarante-six heures par semaine », justifie Claude Jacquot, délégué FO à Darty Ouest. En lieu et place, l'organisation syndicale se bat pour faire requalifier les contrats de travail des salariés qui, souvent payés à temps partiel, faisaient beaucoup plus que leurs horaires. « Les livreurs tournaient à 17-18 livraisons par jour. On leur donnait des primes pour les récompenser, mais c'était du travail dissimulé », explique Claude Jacquot.

Le pire accord de la place ?

En matière de RTT, c'est Darty Ile-de-France qui a fait office de précurseur, avec un texte signé en décembre 2000. « Cet accord nous a permis d'écrire noir sur blanc les pratiques que l'on voulait voir s'instaurer dans l'entreprise pour chaque métier. On a organisé les règles du jeu et les possibilités de dérogation », se félicite le DRH, Gérard Debout. Très détaillé, le texte prévoit des semaines hautes de six jours (quarante-six heures maximum), des semaines moyennes de cinq, et des semaines basses de quatre (vingt-quatre heures minimum). Les vendeurs y ont gagné cinq jours de repos supplémentaires : les magasiniers, caissiers, techniciens en atelier, huit ; les techniciens qui interviennent chez les clients, de dix à quinze, selon les options. Quant aux cadres, ils travaillent dorénavant deux cent quinze jours par an. « Dans la distribution, je ne connais pas de meilleur texte », se félicite Fabrice Attelann, qui l'a signé au nom de la CFDT. « C'est le pire accord de la place de Paris », considère pour sa part Anne-Marie Caccinolo, de FO, en dénonçant la très forte modulation des horaires, sans véritable contrepartie.

Autre exemple, celui de Darty Provence-Méditerranée (1 500 salariés). Là aussi, la modulation des horaires est devenue la norme, avec des semaines pouvant atteindre quarante-six heures en période de forte affluence. « Nous avons fait en sorte de répartir différemment les temps de présence, pour que chacun y trouve son compte. Notre objectif est de maintenir le chiffre d'affaires, donc le montant des primes », explique Jean Blandin, DRH de la filiale. Pour l'instant, difficile d'en tirer un premier bilan : les 35 heures ne sont entrées en vigueur qu'à l'automne. En Provence comme en Ile-de-France, le contrôle du temps de travail se fait par l'intermédiaire de plannings, que les salariés contresignent en fin de semaine. « Un système moins contraignant que les badgeuses, donc plus facile à contourner », dit un vendeur. « La direction voudrait que les plannings ne soient signés qu'une fois par mois. Mais on y est opposé », précise Fabrice Attelann.

Des à-côtés plus confortables

RTT ou pas, le turnover est très important dans les deux enseignes. Chez Boulanger, 40 % des vendeurs seraient partis en 2002 ! Une hémorragie déjà constatée l'année précédente. « On continue à embaucher avec des promesses de salaire et de primes qu'on est incapable de tenir. Au bout de quatre mois, le vendeur a vu qu'on le prenait pour un idiot. Alors, il s'en va », explique Christian Bar. Depuis deux ans, les systèmes de rémunération complémentaire sont, en effet, grippés. C'est le cas de la prime de progrès, un intéressement aux résultats du magasin (ou du SAV) versé trimestriellement, en fonction de la progression du chiffre d'affaires et du résultat d'exploitation. La prime, il y a deux ans encore, représentait 6 à 7 % du salaire. « Ce système s'est complètement arrêté pendant deux à trois trimestres, en 2001, explique le DRH. Mais il est en train de repartir. » Autres déconvenues : l'absence de participation en 2001, la baisse de l'action Boulanger, après six années d'euphorie, l'absence de treizième mois et de Ticket Restaurant… « Les nouveaux n'ont connu que les deux dernières années, qui ont été très difficiles. Pas les précédentes, qui étaient excellentes », regrette Chitina Deboosere, responsable du développement des RH, qui promet des jours meilleurs.

Chez Darty, les à-côtés sont, dans l'ensemble, plus confortables. Les salariés sont eux aussi intéressés au chiffre d'affaires de leur entité, et, à défaut de treizième mois, bénéficient tous d'une prime de fin d'année. Mais le montant de cette dernière varie considérablement d'une filiale à l'autre. Elle représente, par exemple, 30 % du salaire de base chez Darty Ouest, 85 % dans le Nord, de 50 à 100 % selon l'ancienneté en Normandie, 100 % en Ile-de-France. Vient s'y ajouter la participation, versée en 2002 dans toutes les régions sauf le Nord-Pas-de-Calais, qui peut atteindre un mois et demi de salaire les bonnes années. Autant d'arguments qui n'empêchent pas les salariés de Darty de prendre la poudre d'escampette. Dans le Nord comme en Ile-de-France, par exemple, plus du tiers du personnel a moins de trois ans d'ancienneté. « Le turnover est très important, mais ce n'est pas nouveau », constate Claude Jacquot, qui voit dans la faiblesse des salaires (aux alentours de 1 100 à 1 300 euros pour les magasiniers, caissières, livreurs et techniciens de Darty Ouest) la principale raison de ces démissions. « Le turnover est important sur les trois premières années, tempère Gérard Debout. Darty, c'est un peu une tribu. Soit on intègre ses rites, soit ça clashe. » Outre les démissions, les licenciements aussi ont tendance à augmenter. « La direction sait pousser un salarié à la démission, assure Anne-Marie Caccinolo. Mais on constate aussi que de plus en plus de salariés s'adressent à nous pour savoir comment se faire licencier. » Ce que semble confirmer le bilan social, faisant état de 140 licenciements en 2001, contre 75 deux ans plus tôt.

Des directeurs sortis du rang

Autre explication des départs, l'absence de perspectives de carrière. « Les vendeurs les plus anciens travaillent dans le gros électroménager, où les primes sont les meilleures, explique un salarié montpelliérain. Les nouveaux commencent au petit électroménager, peu rémunérateur. N'ayant pas de possibilité d'évolution, ils partent. » Pour y remédier, le DRH de cette filiale s'est attelé à faciliter la promotion. « Il y a trois ans, il n'existait pas de vivier de vendeurs capables d'être promus chefs de vente. On a donc mis en place un système de découverte, d'accompagnement et de suivi des candidats potentiels », explique Jean Blandin. En Ile-de-France, la situation est plus favorable. « Darty a été un formidable ascenseur social. Tous nos directeurs de SAV et 90 % de nos directeurs de magasin sont issus du terrain », assure Pascal Ville, DRH vente. Dernier exemple marquant : le directeur qui a fait l'ouverture du magasin de Villebon, en mai 2001, était entré comme magasinier sept ans plus tôt.

Chez Boulanger, la promotion veut aussi dire quelque chose. Actuellement, la moitié des directeurs de magasin sont sortis du rang, tout comme un tiers des chefs de vente sont d'anciens vendeurs. Des taux très honorables, mais inférieurs à ceux du passé. « Historiquement, les directeurs de magasin étaient d'anciens vendeurs. Mais notre rythme d'expansion soutenu nous a amenés à recruter davantage à l'extérieur, justifie Alain François. Au final, on constate qu'on obtient de meilleurs résultats lorsque l'encadrement commercial est issu de la vente. » Pour tenter de mieux fidéliser ses salariés, l'enseigne lilloise, qui prévoit d'ouvrir de quatre à six nouveaux points de vente par an jusqu'en 2006, est décidée à stabiliser ses équipes d'encadrement. Désormais, les directeurs de magasin devront poser leurs valises pendant trois ans avant toute mutation.

Pour renforcer la culture d'entreprise, Boulanger mise également sur les processus de formation et d'intégration, auxquels l'entreprise consacre 5,6 % de sa masse salariale. Toute nouvelle recrue suit un parcours d'intégration de cinq semaines, consacré à la découverte de l'entreprise et des produits et à l'apprentissage des techniques de vente. Une formation qui, depuis quelques mois, ne se fait plus dans le magasin d'attribution. « La direction s'est rendu compte que les parrains rechignaient à conseiller leurs filleuls, de peur qu'ils ne les concurrencent ensuite dans le rayon », explique Christian Bar (FO). Autre axe de travail : le renforcement des formations au management pour les cadres. « Nos managers doivent être plus à l'écoute de leurs salariés, les respecter davantage en tant qu'individus », explique Jacques Lérisson, directeur de l'école des métiers, située à Villeneuve-d'Ascq.

Chez Darty, les processus d'intégration sont moins formalisés et moins développés. L'entreprise, qui possède un petit centre de formation pour ses cadres, consacre 1,7 % de sa masse salariale à la formation en Normandie. Et 3,4 % en Ile-de-France, où les nouveaux embauchés bénéficient d'un séminaire d'intégration de quatre jours. Pour mieux fidéliser son personnel, Darty envisage de mener des enquêtes d'opinion internes. « Ce serait une façon de contraindre le management à s'adapter aux managés », explique Christian Brière. Histoire de vérifier que le « contrat de confiance » profite aussi aux salariés.

Le spleen des anciens

« C'était mieux à l'époque. » Dans la bouche des anciens de Darty et de Boulanger, la phrase revient comme une rengaine. « Dans les années 70, les vendeurs gagnaient l'équivalent de quatre smics. Il n'y avait aucun conflit chez Boulanger et pas de raison d'y en avoir », explique Christian Bar, entré dans la maison voilà trente-deux ans. Ainsi, en 1968, pas une heure de grève à déplorer dans l'enseigne lilloise… « Les frères Darty étaient véritablement à l'écoute des salariés. À l'époque, les syndicats n'avaient pas besoin d'être revendicatifs », souligne Anne-Marie Caccinolo, embauchée en 1974. Piscine aménagée pour les livreurs du dépôt de Mitry-Mory, distribution gratuite d'actions, cinquième semaine de congés payés avant l'heure… les avantages ne manquaient pas. Point d'orgue de ces belles années, le rachat de l'entreprise par le personnel, en 1988. Plus de 90 % des salariés participent alors à l'opération qui leur permet, cinq ans plus tard, de quintupler leur mise lors de la prise de contrôle par Kingfisher. « Pour les anciens, la nostalgie vient surtout du changement de fonctionnement. Nous sommes passés d'une entreprise familiale à une entreprise économique », remarque Jean Blandin, le DRH de Darty Provence-Méditerranée. Une explication qui vaut aussi pour Boulanger, depuis l'arrivée de la famille Mulliez. Autre facteur de spleen : l'évolution du marché. « Dans l'électroménager, on se situe essentiellement sur un marché de renouvellement, avec peu d'évolutions technologiques et des prix de vente stables, voire déflationnistes », note Alain François, le DRH de Boulanger. Rien à voir avec les Trente Glorieuses ! Autant de raisons qui rendent difficile la cohabitation entre les anciens et les nouveaux et obligent les deux enseignes à réfléchir à leur évolution. « Le syndrome que nous devons éviter, c'est celui du Club Med, prévient Christian Brière, DRH groupe de Darty. La vraie préoccupation, c'est de réussir à adapter la recette qui a fait notre passé glorieux.

Auteur

  • Stéphane Béchaux