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Le néoproductivisme en accusation

Livres | publié le : 01.06.2004 | H. G.

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Le néoproductivisme en accusation

Crédit photo H. G.

La collection «La République des idées» nous réserve une bonne surprise avec ce livre de Philippe Askenazy traitant des conditions de travail dans nos sociétéspostindustrielles. L'économiste part d'un constat troublant. Depuis la fin des années 70, on a assisté à l'avènement d'un nouveau productivisme, qu'il qualifie de «réactif». Ce terme générique recouvre des pratiques innovantes, conjuguant polyvalence,polycompétence,équipes autonomes, juste-à temps et qualité. Une nouvelle configuration du système productif dont les différentes composantes semblent tendre vers un enrichissement du travail. Or, et c'est le deuxième temps de la démonstration, toutes les enquêtes révèlent une montée quasi concomitante du sentiment de pénibilité chez les travailleurs.«Le problàme vient-il de la nature même des nouvelles organisations réactives ou bien du fait que l'on n'a pas su prendre en compte la question des conditions de travail lors de leur mise en place?» se demande l'auteur.

Avant de fournir une réponse, Philippe Askenazy consacre un long développement aux diverses lectures de ce paradoxe. La premiàre consiste à nier qu'il y ait problàme. La dégradation apparente des conditions de travail viendrait d'une meilleure mesure du phénomàne. Elle serait due aussi à une progression du niveau d'exigence des nouveaux salariés, plus sensibles aux nuisances du travail. L'autre interprétation est fournie par le discours des psys, qui, selon l'auteur, «tend à s'imposer dans le champ médiatique en Europe».Notamment au travers du thàme désormais banalisé du «harcàlement au travail». Une lecture teintée de fatalisme, rendant presque vaine toute politique de lutte pour l'amélioration des conditions de travail. Pour Askenazy, il n'y a aucune fatalité dans cette évolution. Il s'appuie sur l'exemple américain où, durant l'àre de la «nouvelle économie», à la fin des années 90, grâce à une remobilisation syndicale et à un durcissement de la régulation, les entreprises se sont engagées dans des programmes efficaces d'amélioration des conditions de travail. Dans la foulée, on a pu constater une baisse réelle des risques courus par les salariés américains, ainsi qu'une hausse de leur satisfaction au travail. À l'inverse, le «productivisme réactif» peut vite devenir une sorte de «néostakhanovisme » si l'on ne fait pas preuve de vigilance. Askenazy estime que, faute d'avoir prêté l'attention nécessaire à ce danger, les 35 heures se sont traduites en France par une dégradation des conditions de travail. Il lance donc un appel salutaire pour redonner toute son importance à ce que la CFDT avait stigmatisé, il y a longtemps, comme «les dégâts du progràs».

Auteur

  • H. G.