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Idées

Syndicalisme : un passé trop présent

Idées | Livres | publié le : 01.06.2006 | H.G.

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Syndicalisme : un passé trop présent

Crédit photo H.G.

Histoire des syndicats (1906-2006), Dominique Andolfatto et Dominique Labbé. Éditions Seuil, collection « XXe Siècle ». 380 pages, 24 euros.

Galvanisés par la victoire sur le CPE, les principaux syndicats français tiennent congrès cette année dans une ambiance de renouveau. On redécouvre les vertus de l'union. On savoure le fait d'être courtisé par les candidats à la présidentielle. On chante les louanges de la négociation. Bref, le livre de Dominique Andolfatto et Dominique Labbé arrive à temps pour souligner les limites de ce jeu de rôle convenu. Pour eux, la charte d'Amiens, véritable vache sacrée de l'historiographie syndicale, aura été porteuse d'une des dérives les plus dommageables pour nos syndicats : la politisation. « Contrairement à une légende tenace, la charte n'a nullement réglé la question de la neutralité politique du syndicalisme… C'est même l'inverse qu'elle a légitimé en autorisant, de fait, la pratique hypocrite de la “double casquette” qui caractérise le syndicalisme français jusqu'à nos jours. »

À Amiens, ce n'est pas le « peuple » des syndiqués qui était présent, rappellent-ils, mais des notables du syndicalisme. Loin d'être unanimiste, ce congrès fut le théâtre d'un affrontement idéologique pour le contrôle du mouvement syndical opposant socialistes et anarchistes. Chacun faisant de la surenchère verbale. D'où une vulgate révolutionnaire qui se traduit par une omniprésence du thème de la grève générale. Pourtant, soulignent les auteurs, « de quelque manière que l'on tourne le problème, il semble difficile de parler de mouvement « révolutionnaire » pour qualifier la CGT de 1906 », qui ne dépassait pas 5 % de syndiqués dans l'industrie et 3 % pour l'ensemble des salariés d'exécution.

Pour Labbé et Andolfatto, c'est un syndicalisme en vase clos, éloigné de ses racines sociales, qui s'est imposé il y a un siècle. Et cet enfermement des sydicats dans des logiques institutionnelles et bureaucratiques, tout en permettant la perpétuation d'un discours « révolutionnaire » tournant à vide, constitue le principal frein à la syndicalisation.

Plus tard, font-ils valoir, la professionnalisation du syndicalisme s'est accrue, grâce au développement des protections législatives et de l'État providence, ce qui a encore plus favorisé sa « confiscation par les syndicalistes ». Ils appellent donc de leurs vœux une nouvelle « charte » pour une refondation démocratique des relations du travail. Précis, au point d'être ardu parfois, leur travail renouvelle l'analyse de la désyndicalisation et de la crise du modèle français.

Auteur

  • H.G.