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Idées

Crise salutaire ou pandémie ?

Idées | Bloc-notes | publié le : 01.11.2008 | Rose Marie Van Lerberghe

PRIORITÉ À L’EMPLOI

La crise financière a d’ores et déjà des conséquences sur l’économie réelle. Même saines, les entreprises accèdent plus difficilement au crédit. Celles qui sont cotées ont vu leur valeur s’effondrer sans rapport avec leur activité propre. Et tout le monde craint l’impact qu’aura la crise sur le pouvoir d’achat et donc sur la consommation. Le premier réflexe est de bloquer ou de reporter les embauches. Encore une fois, ce seront les jeunes fraîchement sortis des écoles ou des universités qui en pâtiront. Les récentes mesures concernant l’emploi des seniors risquent, elles, d’être remises à plus tard. Au-delà, les conséquences sur l’emploi apparaissent inévitables, même si nul ne peut en prédire l’ampleur. L’emploi est d’ailleurs redevenu, selon TNS Sofres, la première préoccupation des Français.

LES PARACHUTES DORÉS, PARTIE ÉMERGÉE DE L’ICEBERG

La crise actuelle remet le projecteur sur les parachutes dorés. On se scandalise de voir des dirigeants qui ont amené leur entreprise à la faillite partir avec des millions d’euros de dédommagement. C’est peut-être l’occasion de dénoncer un autre scandale qui, pour n’être pas aussi spectaculaire, n’en est pas moins choquant. Aujourd’hui, on ne peut plus se séparer d’un cadre peu performant, voire récalcitrant, sans lui verser des indemnités considérables (en moyenne un an de salaire) exonérées d’impôts et de cotisations sociales. Face à des juges toujours prompts à prendre la défense des faibles contre les forts et donc des salariés contre leurs employeurs, le Code du travail est utilisé dans toute sa complexité par des avocats qui en ont fait une spécialité pour rendre quasi impossible le licenciement d’un cadre, même récemment embauché, sauf à négocier une « transaction ». Cette dérive participe de la même déconnexion entre le travail et la rémunération. Il est aujourd’hui plus facile pour un cadre de s’enrichir en se faisant régulièrement licencier que d’être performant et loyal envers son entreprise. Il est urgent de rétablir le lien entre la rémunération et le « dur labeur », comme disait Max Weber.

LA CRISE COMME OPPORTUNITÉ

La crise peut donc nous amener à un rétablissement salutaire des valeurs et d’abord de la valeur du travail. Dans les années récentes, on a oublié que la finance n’est qu’un outil au service de l’économie. Les rémunérations folles liées aux performances à court terme des transactions ont attiré massivement nos jeunes les plus brillants vers la finance plutôt que vers la production de biens et de services. Polytechnique rivalise avec HEC pour former, à grands frais pour le contribuable, des jeunes gens qui s’empressent d’aller monnayer leurs talents à la City. La prospérité des nations a davantage besoin d’ingénieurs et de chercheurs que de petits génies de la finance qui jonglent avec les modèles mathématiques dans un monde virtuel. Espérons que la hiérarchie des rémunérations reflète un peu plus l’utilité sociale et que le profit des entreprises sanctionne davantage la qualité des biens et services que la performance financière à court terme.

Auteur

  • Rose Marie Van Lerberghe