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Nouvelles économies, nouvelles dépenses… Que prévoit le projet d’accord « assurance-chômage » ?

Assurance chômage | publié le : 13.11.2023 | Benjamin d'Alguerre

Nouvelles économies, nouvelles dépenses… Que prévoit le projet d’accord « assurance-chômage » ?

Nouvelles économies, nouvelles dépenses… Que prévoit le projet d’accord « assurance-chômage » ?

Crédit photo MrAshi/Adobe stock

Mal engagée, la négociation sur la nouvelle convention d’assurance-chômage 2024-2027 est tout de même parvenue à son terme. Le protocole d’accord, validé par le patronat et trois organisations syndicales, s'écarte de la trajectoire financière déterminée par le document de cadrage gouvernemental tout en s'attachant à un certain équilibre budgétaire. Demeure désormais la question de sa validation par l’exécutif et, au-delà, celle du devenir du paritarisme de gestion.

Cela n’aura été ni sans heurts, ni sans portes qui claquent, mais au terme d’un marathon de deux jours de négociations jeudi 9 et vendredi 10 novembre, les partenaires sociaux sont parvenus à s’entendre sur l’ébauche d’un compromis sur la prochaine convention d’assurance-chômage 2024-2027.

Si, dans le camp patronal, on peut célébrer l’unité retrouvée après la difficile négociation Agirc-Arrco qui avait vu le fossé se creuser entre Medef d’un côté et CPME et U2P de l’autre, les syndicats, eux, ont joué leur propre partition. La CFDT et la CFTC avaient dès le 10 novembre au soir indiqué leur intention de le signer. FO s'est également prononcé en faveur d'un paraphe mais quelques jours plus tard. Chez les réfractaires, CGT et CFE-CGC ont d'ores et déjà dit non, la seconde ayant même quitté la table des négociations en cours de route, faute d'avoir obtenu la fin de la dégressivité des allocations pour les demandeurs d'emploi indemnisés touchant plus de 4500 euros net mensuels. Une mesure qui pénalise particulièrement les cadres au chômage. 

L'accord a minima semble donc acquis, qu'il soit à cinq ou à six signataires sur huit. Ce qui ne signifie pas pour autant qu'en bout de course, Matignon le validera. Le texte a beau réaffirmer les principes intouchables - selon l'exécutif - de la dégressivité des allocations et de la contracyclicité de leur versement, il n'en sort pas moins des clous financiers que lui imposait la lettre cadrage d'un gouvernement qui reste droit dans ses bottes quant au désendettement du régime et à la ponction de 11 à 12 milliards sur ses excédents afin de financer ses politiques de l'emploi. A ce jeu, l'Etat n'a d'ailleurs pas attendu la négociation des partenaires sociaux pour introduire dans sa loi de finances 2024 un projet de prélévement de 2 milliards dès 2023 en vue du lancement, l'année prochaine du futur opérateur France Travail. 

Travail d'équilibriste

Pourtant, les partenaires sociaux auront jusqu’au dernier moment joué les équilibristes pour parvenir à un projet d’accord parvenant, sinon à s'engager dans la trajectoire financière imposée par l'Etat, du moins à en respecter l'esprit en cherchant à compenser systématiquement les nouvelles dépenses par de nouveaux pôles d'économies. 

Du côté des coûts, la réduction de la cotisation employeur de 4,05% à 4% de la masse salariale des entreprises arrachée par le patronat devrait représenter un manque à gagner pour le régime d'1,5 milliards sur quatre ans même s'il aura finalement échoué à faire passer cette contribution en dessous de la barre des 4% Pour compenser, les représentants des employeurs ont dû lâcher aux syndicats une réduction de six à cinq mois du temps de travail nécessaire avant indemnisation pour les primo-arrivants sur le marché du travail (essentiellement les jeunes) et les travailleurs saisonniers qui bénéficieront par ailleurs d'une indemnisation minimale de cinq mois. Total de la facture: 815 millions d'euros. A l'autre bout du spectre, un geste a été accordé aux seniors (même si la plupart des dispositions prévues à leur endroit lors des premières séances de négociation feront l'objet d'une négociation ultérieure) via le passage de la dégressivité de 30% des indemnités du seuil de 57 ans à celui de 55. 

Pour compenser ces dépenses supplémentaires difficile à avaler pour le gouvernement, il aura fallu lâcher du lest. En introduisant la notion de calcul sur trente jours calendaires du versement des allocations, les signataires prévoient de permettre à l'Unédic de réaliser une économie de 950 millions, toujours sur quatre ans. Mais au détriment des chômeurs qui, dans ce scénario, perdront le bénéfice de l'allocation versée chaque 31 du mois. Au total, ce sont cinq jours d'indemnisation (et même six les années bissextiles) qui pourraient être perdus par les allocataires. Autre source de réduction des dépenses: la chasse aux chômeurs-créateurs d'entreprises qui abusent de ce statut pourrait représenter une économie de 870 millions. A rajouter aux 440 millions supplémentaires obtenus « automatiquement » par le relèvement de deux ans de la borne d’âge de départ à la retraite. 

Enfin, si le patronat n'est pas parvenu à obtenir la peau du bonus-malus instauré en 2019, il a tout de même réussi à en arrondir les angles. Primo, en retirant les licenciements pour inaptitude, ruptures conventionnelles ou CDD de remplacement de la liste des fins de contrats donnant lieu à un malus sur les cotisations patronales. Deuzio, en limitant le calcul du malus aux seules fins de contrat de moins d’un mois. La tâche de réaliser une évaluation de ces dispositifs est confiée à un groupe de travail paritaire qui devra rendre ses conclusions fin août 2024.

Auteur

  • Benjamin d'Alguerre