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Protection sociale : premières pistes de réforme

Protection Sociale | publié le : 18.09.2023 | Gilmar Sequeira Martins

Dominique Libault, président du Haut Conseil de financement de la protection sociale.

Dominique Libault, président du Haut Conseil de financement de la protection sociale.

Crédit photo SIPA / Jacques Witt

Missionné par la Première ministre, le Haut Conseil de financement de la protection sociale a livré ses première pistes. Pour maintenir la progression des ressources et donc un  « haut niveau de protection », il faut augmenter les taux d’activité de trois catégories : les femmes, les seniors et les NEET. En parallèle, il faudra rester vigilant sur le coût croissant des allègements d’exonérations de cotisations, lié à la forte augmentation du Smic, et veiller à l’impact de la transition écologique sur la croissance économique afin de garantir les ressources dont disposera le système de protection sociale.

Missionné par la Première ministre en juin, le Haut Conseil pour le financement de la protection sociale (HCFiPS) a lancé des travaux qui doivent aboutir à la livraison de deux rapports début 2024. Ils portent sur deux thématiques : la première portant sur l’examen des relations entre la sphère de la production économique, source de financement, et celle de la protection sociale, acteur de la redistribution ; la seconde sur la lutte contre la fraude sociale. Lors d’une conférence de presse, Dominique Libault, le président du HCFiPS, a d’abord souligné l’importance du système de redistribution puisqu’il compte pour un tiers du PIB, l’enjeu à ses yeux, étant de « bien combiner » la sphère économique productive et celle de la redistribution. Que reproche-t-on au système actuel ? Dominique Libault a reconnu que son coût pouvait être considéré comme « un sujet pour la compétitivité et l’emploi », mais aussi que son « éventuelle générosité » pouvait constituer une incitation, pour certains, à se « désintéresser du travail », faisant surgir une « préférence du non-travail par rapport au travail ».

S’il reconnaît que ces deux critiques émises par les représentants des entreprises peuvent être entendues, Dominique Libault leur rappelle qu’ils ont aussi une responsabilité dans l’ensemble du fonctionnement : « La protection sociale peut aussi interroger le système de production, d'une part, notamment en interrogeant sur sa capacité à répartir également les richesses, les revenus au sein de la population. C'est la répartition des revenus primaires, parce que s'il y a une très mauvaise répartition, cela va ensuite solliciter la protection sociale pour corriger en partie ses illégalités (ces inégalités). Plus la distribution de richesses est inégale, plus le système de protection sociale va être sollicité. »

Autre enjeu capital dans les relations entre les entreprises et le système de protection sociale : la santé des travailleurs. « Si le système de production produit en altérant la capacité ou la santé des travailleurs de diverses façons, évidemment, le système de protection sociale va devoir mettre en œuvre ces processus de réparation pour indemniser ces atteintes », souligne Dominique Libault. Ce sujet va prendre une importance croissante puisque la population vieillit et que les salariés sont appelés à rester plus longtemps en activité, avec la réforme des retraites qui a porté de 62 à 64 ans l’âge légal pour bénéficier d’une pension.

La transition écologique est-elle compatible avec un haut niveau de protection sociale ?

Compte tenu des enjeux actuels, comment garantir un haut niveau de protection sociale ? Pour Dominique Libault, il faut de toute évidence conserver un « système de production fort », autrement dit, « qui assure une forme de croissance ». À l’heure de la transition écologique, cet objectif n’est plus si partagé qu’il pouvait l’être il y a encore quelques années.

Sur les « incitations à la désactivation de l’emploi », le président du HCFiPS estime que ce type de critique n’a pas lieu d’être. Il met en avant le système d’allègement des cotisations sur les bas salaires, mais aussi le RSA et la prime d’activité. Ces deux derniers dispositifs ont, selon Dominique Libault, « été travaillés de façon à essayer de ne pas désinciter au travail ». S’il assure que le « constat est plutôt positif », il annonce que le HCFiPS va néanmoins se pencher encore sur cette question.

L’une des pistes pour améliorer la situation consisterait à améliorer les taux d’emploi, inférieurs à ceux des pays proches selon le président du HCFiPS. Cela aurait un double avantage : accroître les ressources du système de protection sociale tout en réduisant ses coûts. Dominique Libault estime que les efforts doivent porter sur trois publics : les femmes, les seniors et les jeunes qui ne sont ni en formation ni en emploi. L’élévation de ces taux d’emploi est d’autant plus souhaitable qu’est actuellement observé un ralentissement de la progression des ressources financières… qui risque de perdurer du fait de la transition écologique, susceptible d’affecter la croissance économique, selon le rapport de Jean Pisani-Ferry.

Dominique Libault appelle parallèlement à la vigilance sur le coût croissant des allègements généraux de cotisations. La forte augmentation du Smic a eu pour effet mécanique d’augmenter la masse salariale pouvant bénéficier de ces mesures. Les entreprises sont d’autant moins enclines à augmenter les rémunérations que ce mouvement de hausse du Smic leur permet de bénéficier mécaniquement d’un montant supérieur d’allègements. À ce premier frein à l’augmentation des salaires, source de financement essentielle de la protection sociale, s’ajoute « la substitution d'augmentation salariale par la prime de partage de la valeur », elle aussi exonérée de cotisations.

 

Auteur

  • Gilmar Sequeira Martins