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Incitation à l'adhésion syndicale: la proposition-choc de la CFE-CGC

Dialogue Social | publié le : 05.04.2022 | Benjamin d'Alguerre

Pour redonner de l’espace de décision à la démocratie sociale, la CFE-CGC propose une réduction des bénéfices de la négociation collective aux seuls adhérents des syndicats signataires, ainsi qu’un rééquilibrage de la représentativité patronale.

« Restaurer la confiance dans la démocratie sociale. » C’est l’un des objectifs fixés dans le document de 200 pages que la CFE-CGC vient d’adresser aux candidats à l’élection présidentielle 2022. « Malgré des réformes importantes et des déclarations récurrentes sur l’importance du dialogue social, les constats se suivent et se ressemblent : la confiance dans la démocratie sociale reste en berne », déplore la centrale des cadres. « Le mouvement des gilets jaunes est un signe fort de cette perte de confiance. » Selon les chiffres 2018 de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le chiffre de la syndicalisation en France se traîne toujours à 10,8%, alors qu’elle est de 16,2% dans les autres pays membres de l'OCDE.

À qui la faute ? À une réforme de la représentativité syndicale de 2008 « qui devait redynamiser le syndicalisme, mais qui n’a pas répondu aux attentes espérées », un bénéfice des accords collectifs partagé entre tous les salariés qu’importe leur adhésion – ou non – à une organisation syndicale, des ordonnances Travail de 2017 qui ont appauvri les instances représentatives du personnel et recentralisé le dialogue social au niveau des sièges des entreprises, des politiques jugeant illégitimes des syndicats comptant peu d’adhérents et un patronat qui considère toujours avec méfiance le salarié affichant une appartenance syndicale, affirme la CFE-CGC.

Face à ce constat, la centrale de l’encadrement répond par la suggestion d’un traitement de choc : « Réserver le bénéfice des accords aux seuls adhérents des organisations syndicales signataires », expliquait François Hommeril, son président, à l’occasion d’une conférence de presse le 5 avril. Une solution « à l’allemande » que le syndicat porte de longue date, mais qui serait de nature à convaincre les salariés de s’engager. Dans ce scénario, les non-syndiqués ne pourraient prétendre à bénéficier des acquis obtenus par la négociation collective, exception faite de quelques grands sujets transversaux en matière de salaires, de formation professionnelle ou concernant les grilles de classifications, par exemple.

Si cette réforme aurait le mérite de développer l’appétence des salariés pour l’adhésion syndicale, elle risquerait, en cas d’entrée en vigueur, de se heurter au principe constitutionnel de l’égalité de tous devant la loi. François Hommeril est conscient du caractère provoquant de cette proposition : « C’est notre réponse aux politiques qui jugent les syndicats illégitimes en comparant le taux de syndicalisation français à celui de l’Allemagne ou de la Belgique. Limitons le bénéfice des accords aux seuls adhérents des organisations syndicales et vous verrez le taux de syndicalisation monter en flèche. Parce qu’aujourd’hui, la réalité dans les entreprises, c’est que celui qui se syndique s’attire la méfiance des directions », affirme-t-il.

À défaut d’une réforme aussi radicale, la CFE-CGC en imagine deux autres, afin de redonner de la voix à un dialogue social atone. En premier lieu, un sérieux retour en arrière concernant les ordonnances Travail de 2017 qui ont fusionné les instances existantes (CE, CHSCT et délégués du personnel) en un unique comité social et économique (CSE) éloigné des salariés et dont même le comité de suivi a avoué, en décembre dernier, l’échec partiel. « Le moyen le plus simple pour restaurer la confiance dans les CSE serait un retour en arrière. Il faudrait remettre en place les instances telles qu’elles existaient. On a créé quelque chose qui ne fonctionne pas », détaille François Hommeril. Difficile cependant d’imaginer un effacement complet des ordonnances. « Je n’y crois pas », confie le leader de l’organisation syndicale, qui préfère un travail progressif visant à ce que, « petit à petit, les salariés soient de nouveau représentés correctement ». En obtenant davantage de pouvoir représentatif pour les représentants de proximité, par exemple, mais surtout en réaffirmant le monopole syndical pour la négociation et la conclusion d’accords. Une manière d’en finir avec les référendums d’entreprises autorisés par les ordonnances, donc…

Surtout, la centrale des cadres entend aussi redonner de l’équilibre au dialogue social par une nouvelle réforme de la représentativité… patronale, avec comme objectif un rééquilibrage des forces entre organisations d’employeurs, « afin que le Medef cesse d’être le seul à avoir les clés du camion ». Cette réforme passerait par une reconnaissance accrue du nombre d’entreprises adhérentes d’une confédération patronale au détriment du nombre de salariés qu’elles emploient, cette forme de calcul pouvant être susceptible de faire pencher la balance en faveur des TPE et PME.

Auteur

  • Benjamin d'Alguerre